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(Calixte) ~ Car nos coeurs sont hantés.  Empty (Calixte) ~ Car nos coeurs sont hantés.

Lun 27 Aoû - 0:34
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Car nos coeurs sont hantés
Il y a certains évènements qu'on voudrait n'avoir jamais vécus. Qu'on donnerait tout pour oublier. Et qu'on se remémore avec d'horribles pincements au cœur.



Parfois, elle se demandait comment elle avait pu autant se détacher de ce monde qui était le sien. Alice, elle était perdue dans son monde merveilleux, loin des paillettes et du sang qui auraient dû faire son quotidien. Elle s’était enfermée dans la nature, avait profité des chevaux et des courses sans un seul regard derrière elle. Pourtant, le passé finissait toujours par rattraper les âmes errantes, fuyantes. Elle n’avait pas fait exception cette fois-ci. Elle n’avait jamais fait exception, mais la rousse, elle avait la chance d’être la petite dernière, la gamine à qui personne ne demandait rien, si ce n’était de ne pas faire tâche à son sang. Être bien, se comporter comme il faut, ne pas faire de vagues… Et elle s’y tenait bien Alice, puisque cela lui offrait sa liberté. Sacrifier quelques opportunités pour atteindre son objectif final, cela ne l’avait jamais dérangée. Elle était comme ça la jeune femme, juste à vouloir profiter de tout, ne rien avoir à faire avec les veilleurs, la haute société, autant que possible…. Evidemment, parfois, elle n’avait pas le choix, et elle se devait d’avoir un minimum de présence, mais elle n’avait jamais été au-delà de ce qu’on lui demandait.

Elle n’était pas comme Calixte ou Edward. Eux, ils passaient leur temps embourbés dans ces histoires de mutants et de veilleurs, à devoir apporter l’honneur sur leur famille, à devoir se battre pour… Enfin, elle devrait le faire aussi elle. C’était ce que Calixte lui répétait, lui répèterait sans cesse, lui qui n’appréciait pas la voir autant détachée du rôle qu’elle était supposée avoir… Cependant, tout était bien plus compliqué que cela.

Sur le balcon, elle jeta un coup d’œil aux grandes tentes blanches en train d’être montées dans le jardin de la Résidence secondaire de sa famille. Elle avait bien une dizaine de minutes pour se perdre dans ses pensées, réfléchir à la soirée qu’elle organisait. Car oui, pour une fois, Alice avait décidé que les humains, les êtres vivants, étaient plus importants que ses précieux chevaux, le temps de quelques jours, quelques semaines. En fait, l’horreur de la situation l’avait elle-même choquée, d’autant plus que son propre frère faisait partie des victimes, toujours en vie. Le coma avait duré, si longtemps… Alice était passée à l’hôpital, rapidement, elle dont la vue de la moindre goutte de sang pouvait la faire basculer dans les vapes. Elle avait vu le corps inerte, les tuyaux branchés de partout. Elle n’avait pas pu s’en approcher l’enfant, trop effrayée. Et il y avait Edward. L’aîné. Le modèle. Le protecteur… Elle l’avait évité quelque temps, digérant toujours la nouvelle des fiançailles qu’il avait prévues pour elle, sans jamais la consulter. Elle lui faisait confiance, entièrement. Ca avait été un poignard en plein cœur, suivi d’un goût amer dans la bouche, désillusion totale… Ajouter à cela le secret qu’elle se devait de garder, le regard à la fois sombre et inquiet qu’elle portait sur la silhouette du futur duc, il y avait de quoi l’éviter un moment, le temps de remettre les pendules à l’heure dans son cerveau…

Cependant, cette visite lui avait fait prendre conscience de la gravité des faits. Il n’y avait pas que Calixte, non. Il y avait eu des humains, morts, blessés. Des familles brisées par un acte revendiqué par personne. Elle avait dans les pupilles cette mère en pleurs, dont le fils était en soins intensifs, et les propos du corps médical restaient gravés dans sa mémoire. Nous ne savons pas s’il va s’en sortir, mais il faut vous préparer au pire. Et il y avait ces autres, ceux qui n’avaient pas forcément l’argent, ceux qui perdaient une somme astronomique pour soigner l’un des leurs. Alors oui, Alice avait ouvert les yeux. Elle avait beau être une garce, penser à elle en priorité, vivre dans un autre monde, y’avait un cœur qui pulsait derrière ses côtes, avec toutes les émotions qui allaient avec. Douleur réelle, et elle avait pris sa décision. C’était mieux que rien, toujours.

Elle avait fait demi-tour peu de temps après Alice, avait retrouvé le calme de la maison secondaire, résidence principale pour elle. Un environnement propice à la réflexion, alors que ses méninges refusaient de se calmer. Tout allait trop vite, trop loin, trop fort. Il fallait faire quelque chose. C’était son devoir. Alors, la main avait pris le combiné, et elle avait téléphoné, rameuté la haute société. Son nom était une porte d’entrée auprès de tous, et pour la première de sa vie, elle s’en était allégrement servie. Et en une après-midi, elle avait bouclé ses projets.

Voilà comment elle en était arrivée là, plus de trois semaines plus tard. Son idée ? Un gala de charité, avec une tombola, de quoi rameuter la crème de la société anglaise pour une après-midi, une soirée. Et les fonds allaient être transmis aux familles des victimes. Un acte de générosité qui n’était pas totalement désintéressé, puisque les répercussions sur les Seymour allaient être plus que positives. Enfin, ça, c’était dans l’optique où tout se passerait bien, et où personne ne viendrait mettre le nez dans ses affaires.

Elle finit par descendre, retrouver les personnes dédiées à la création de l’événement, sous sa houlette. « Amara, peux-tu apporter les voiles écrus et bordeaux s’il te plaît ? Je veux voir leur placement. » La réponse fusa : « Bien sûr Madame. » Et elle poursuivit son chemin Alice, quitta les murs froids de la masure pour se retrouver en extérieur. Son domaine. Profonde inspiration, et les pas glissèrent sur l’herbe fraîche, la robe volant au gré des courants d’air. Elle observait, détaillait les allers et venues, les mouvements des décorateurs, des pâtissiers, des organisateurs… Elle se perdit, jusqu’à ce qu’une présence ne la rappelle dans le présent. Le regard se porta sur la silhouette, l’étonnement perceptible dans le fond des iris : « Calixte ? » Après tout, il avait beau habité par ici, elle avait l’impression d’avoir vu son corps allonger sur le lit d’hôpital hier…




@H. Calixte Seymour

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Dim 2 Sep - 16:55
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Car nos coeurs sont hantés

   alice & calixte
 
 
 
Evidemment. Il aurait dû s’en douter : quand la voiture tourna à l’angle du chemin qui menait à la dépendance secondaire, quand les jardins du second manoir Seymour apparurent et fleurirent sous ses yeux, quand la bâtisse s’éleva en quelques étages et de multiples fenêtres, quand des tentes blanches peuplées de chaises et de personnes chargées de les installer fourmilla devant lui, Calixte fit la remarque que, bien évidemment, il aurait dû s’attendre à un comité d’accueil de cet acabit. Grande fut sa déception à la descente du véhicule, aidé par un Léopold soucieux, quand il comprit qu’il n’en était rien, que toute cette agitation ne tournait pas autour de son petit nombril et qu’il ne s’en fallait même guère plus pour qu’il passât complètement inaperçu. Calixte pinça les lèvres, prit son inspiration et dédaigna le fauteuil que lui proposa Leopold pour se contenter, dans un premier temps, de s’appuyer à la carrosserie, d’où il bénéficiait d’une bonne vue sur les jardins encore froids d’un printemps tout juste balbutiant. Calixte se recroquevilla dans le lourd manteau de laine qui le maintenait au chaud, plissant les yeux pour trouver une raison valable à tout ce remue-ménage, puisque ce n’était pas une fête en son honneur qui semblait s’organiser. Leopold, las d’attendre que le cadet de ses protégés se décide à le rejoindre sur le perron de la bâtisse, soupira : Mademoiselle Alice organise un événement, s’attirant un haussement de sourcil curieux et interrogateur de la part du grand frère. Alice organise quelque chose ? De publique, je présume ? Il se décolla de son support, manqua de chanceler, s’attira la réprobation du majordome qui s’empressa de venir le soutenir tout en lui confirmant que oui, il avait bien entendu.

Si Leopold n’avait peut-être pas été là pour les premiers pas de Calixte, il travaillait pour les Seymour depuis tant d’années que c’était tout comme, et de la même manière que Calixte ne pouvait s’empêcher de le voir comme un oncle, un mentor et un ami, il devait assurément considérer chacun des enfants du duc comme ses neveux et nièce, ses protégés et des enfants à surveiller. Ce qui n’était pas si injustifié, lorsqu’on y réfléchissait. Lorsqu’on prenait le temps d’y réfléchir. Un temps que Calixte ne se sentait pas vraiment obligé de prendre pour le moment, les yeux rivés sur la fourmilière gesticulante. A chercher du regard la silhouette de sa petite sœur, une si petite sœur qu’il ne voyait ni grandir, ni changer, trop occupé qu’il était à garder les yeux rivés sur ses propres intérêts, sur ses propres problèmes et sur les aléas qui malmenaient sa petite vie. Une petite sœur qu’il souhaitait protéger, préserver, sans prendre pour autant la peine de toujours s’intéresser à elle. Qu’elle s’investisse dans une œuvre, qu’elle soit bonne ou juste pécuniaire, qui n’impliquait ni canassons, ni concours, c’était nouveau. Pas particulièrement étonnant, mais nouveau. Et tout ce qui était nouveau avait le don, depuis son réveil, de l’irriter. Parce que Calixte, en deux semaines d’inconscience, d’impuissance, d’absence, avait sans cesse l’impression d’être dépassé par le temps qui s’était précipité sans l’attendre, que ce fusse dans les conséquences du Cosmic Ballroom, avec cette réelle chasse à l’homme qui avait pu être lancée par Frisbey, dans les silences et les non-dits de la présence de Papa et de Maman dans la région, dans l’inquiétude qu’Edward avait marqué, l’angoisse qui avait suinté des comportements d’Alice, et cette vie supplémentaire qui grandissait, jour après jour, heure après heure, minute après minute, dans le sein de Pandora, sans l’attendre, sans attendre qu’il accepte de mettre pied à terre, sans lui laisser ne serait-ce que le temps de respirer… le temps ne l’attendait pas, le temps se précipitait, s’égrenait, c’était une course que Calixte avait la désagréable sensation de perdre, c’était un marathon, et lui traînait la patte, encore trop faible pour rester debout, encore trop faible pour ne serait-ce que tenir tête à tout cela. Un vertige, il se résigna à se laisser mener par un Leopold décidément trop protecteur jusqu’à l’intérieur de la bâtisse, oscillant entre l’amertume face à son invisibilité et satisfait que personne n’attarde son regard dans sa direction, alors qu’il avait mauvaise mine.

Pendant d’interminables secondes, Calixte prit le parti de reprendre pied avec la réalité, de se tenir au courant des faits et geste des gens qui se massaient, qui s’activaient, qui déshumanisaient les pièces ouvertes de la demeure, plongeant dans l’intimité de ses quelques souvenirs d’enfance lovés dans les salons et les couleurs du rez-de-chaussée ; pendant d’interminables secondes, le temps que ses quelques affaires se perdent dans ses appartements, un étage au-dessus, Calixte s’affala dans un de ces fauteuils sur la terrasse qui offraient une vue plongeante sur le jardin sans en subir la brise glacée qui le balayait, et qui séviraient encore quelques heures avant que les premières heures de l’après-midi n’impriment les prémices de l’été qui ne tardaient que trop.

Ses doigts glissèrent sur l’accoudoir du fauteuil, répétant quelques notes d’un concerto pour alto qu’il avait réécouté quelques heures plus tôt. Un mouvement, une chevelure rousse, et sa main s’immobilisa. Calixte se leva, coupant court aux protestations de Leopold – toujours attentif – d’un mouvement brusque. Leo, je ne vais pas m’effondrer, je vais juste voir ma petite sœur Et pour aller la voir, il comptait bien discuter avec elle. Il n’aimait pas ça, Calixte, il n’aimait en rien ne pas être le centre de l’attention, il n’aimait pas voir Alice prendre des initiatives comme celle-là, il n’aimait pas l’idée qu’elle grandissait, il n’aimait pas l’idée de rester sur le banc de touche parce qu’une des créatures de cauchemar qui hantaient ses nuits avait eu l’idée pitoyable de lâcheté de s’attaquer à lui, il n’aimait pas, Calixte, se sentir comme le dindon de la farce, écarté du plateau pour avoir été trop faible à un instant, pour le rester encore maintenant alors que même ces hypocrites de Cavendish gloussaient des inepties aux médias pour mieux manipuler l’opinion publique dans leur sens et faire en quelques heures plus de dégâts à la Veille qu’en des décennies d’existence. Il n’aimait rien de tout cela, et se senti si inutile, à cet instant, avoir sous les yeux l’énergie et l’investissement d’Alice, à cet instant… il la vit passer, glisser dans l’herbe, trop semblable à Maman, trop semblable à un feu follet de liberté, trop semblable à cette princesse qu’il aimait, du fond du cœur, mais qu’il enviait, d’une jalousie brûlante et écœurante, pour qu’il l’ignore, pour qu’il accepte de rester sur le côté. Calixte s’approcha, sortit de la véranda, s’adossa à nouveau à un mur, comme un appui nécessaire. Un relai jusqu’à son prochain objectif : cette rangée de chaises qui le narguait, quelques mètres plus bas, une fois les marches qui faisaient le pont entre la terrasse et la pelouse franchies.

Calixte s’approcha, Calixte prit son temps, incapable d’accélérer, prenant le parti d’occuper son pas traînant en observant avec intérêt et attention le ballet qui se jouait sous ses yeux, selon une partition que guidait d’une main de maître une chef d’orchestre énergique et déterminée. Elle lui tournait le dos, pour le moment, donnant des ordres d’un ton trop semblable à celui de Papa pour que cela ne soit qu’une coïncidence, houspillant avec l’intonation de Maman et rappelant à l’ordre avec un caractère qui n’appartenait, et de cela nul ne pouvait en douter, qu’à elle. Un sourire s’étira sur les lèvres d’un pourtant vexé et fatigué Calixte, quand il se rendit compte d’une chose : les Seymour n’étaient en rien des gens du commun. Quand Alice se tourna dans sa direction, peut-être attirée par les regards qui perdaient de plus en plus vers lui, de surprise et d’étonnement – des regards dont Calixte nourrissait son ego bien malgré lui et sans réserver – Calixte ne se départit pas de son sourire, mais laissa transparaître sa fatigue. Martyr, comédien. « Calixte ? » Il fit quelques pas, pour mieux la prendre dans ses bras, indifférent aux spectateurs. Quoique, une part de lui souhaitait se donner en public, comme toujours. Il avait trop besoin de s’arracher de son lit d’hôpital, de cette mort qui lui avait pendu au nez suffisamment longtemps pour que son visage cadavérique ne le hante à chaque fois qu’il fermait les yeux, comme en écho aux cris d’un bébé qui aurait pu naître sans le connaître, lui. Calixte enlaça sa petite sœur, avec bien plus de force qu’il ne le préméditait, avant de s’écarter, de chanceler, de s’appuyer sur son épaule. Surprise ? Je suis arrivé… Un coup d’œil à sa montre. Il y a de cela une heure déjà, avec la discrétion que tu me connais. Jouant au grand frère, comme Edward savait si bien le faire avec lui, il couvrit du regard l’œuvre sa si petite sœur. Tu étais bien trop occupée pour t’en apercevoir, à ce que je vois. Tu t’amuses bien ? Nulle agressivité dans sa voix, juste une légère condescendance qu’il instillait sans le vouloir, sans même s’en apercevoir, trop perdu dans un rôle de grand frère pour parvenir à s’en éloigner. Ses yeux s’attardèrent sur une toile blanche que l’on montait. J’ai eu l’autorisation de sortie ce matin, je suis parti sans demander mon reste, et sans vous en avertir. Qu’elle comprenne là que ni Papa, ni Maman, ni Edward n’étaient au fait de sa sortie précoce. Sauf si, bien évidemment, Leopold n’avait déjà pris la liberté de les en avertir, ce qui ne serait en aucun cas une surprise. Il me tardait de… faire quelque chose.

Et pour faire quelque chose, il envisageait déjà de le faire. De tourner à son avantage ce qu’Alice préparait. Sans lui voler, bien évidemment, la vedette, mais… s’y incrustant, tout naturellement. Sans méchanceté. Juste de l’égocentrisme, un égocentrisme exacerbé, il fallait en convenir, par sa convalescence.

 
 by marelle  

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Dim 21 Oct - 14:19
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Car nos coeurs sont hantés
Il y a certains évènements qu'on voudrait n'avoir jamais vécus. Qu'on donnerait tout pour oublier. Et qu'on se remémore avec d'horribles pincements au cœur.



Le dos était droit, quand les pupilles détaillaient la mise en place du gala de charité. Elle ne laissait aucune place au hasard Alice, décidait du moindre emplacement, du moindre objet déposé dans les tentes. Sans le savoir, peut-être qu’elle ressemblait à sa mère, avec les ordres donnés, les gestes balancés. Les lèvres étaient pincées, au fur et à mesure que la situation prenait une tournure qui l’agaçait. A un instant, les majordomes et domestiques s’étaient arrêtés, regards dans le vide à quelques mètres de là. La rousse, elle tapa dans ses mains deux fois, pour attirer à nouveau l’attention, sans percevoir l’arrivée d’un de ses frères dans la demeure. En fait, c’était son moyen de se protéger aussi, d’oublier les images pourrissant dans un coin de son esprit ; le benjamin à moitié mort sur un lit d’hôpital, l’odeur aseptisée écoeurante, la blancheur étincelante, trop proche du paradis… Ces derniers temps, la Seymour, elle était dans un état second. Elle se souvenait de ce qu’elle avait vu, perçu. Et elle se rappelait de l’aîné, du secret, de ses secrets. Tout n’avait été que jeu et manipulation, cela l’ayant poussée elle-même à s’écarter de tous, ici, dans leur résidence secondaire.

Quelques minutes supplémentaires, pour réajuster des rideaux, des nappes. La blancheur de la tente était trop atteinte de mauvais souvenirs pour la jeune femme, alors, elle la décora, réclama de la couleur, du darkviolet tendre pour tout cacher. Petit à petit, le corps se détendait, alors que l’esprit s’oubliait, se concentrait. C’était sa thérapie, son moyen de faire le point sur sa vie, de s’ignorer. Et c’était ce dont elle avait besoin en ce moment, avant que tous arrivent, tous reviennent, avec leurs faux-sourires, avec l’hypocrisie qui caractérisait ce monde. Au moins, elle saurait une fois de plus pourquoi elle préférait les chevaux aux êtres humains de la haute société…

Puis, y’eut Calixte, sa silhouette, son odeur. Calixte qui était de retour, et seule la surprise se lisait dans ses pupilles, dans son ton. Elle ne l’avait pas masqué, elle n’y serait pas parvenue. Cependant, elle comprit rapidement qu’il n’était pas au meilleur de sa forme. Leur majordome le suivait de près, et ce qu’elle lisait dans ses iris valait toutes les explications du monde. Il venait de revenir, de l’hôpital, d’un état ayant réduit la famille en cendres. Ils avaient du mal à rester unis depuis quelque temps, à apparaître comme une famille forte. Alice y était certainement pour quelque chose, avec son refus de se marier avec Anthony, d’obéir à l’ordre donné par l’aîné. Quant au cadet… Elle aurait beaucoup à reprocher, avec une voix trop proche de celle de maman, de celle qui s’inquiète pour la vie de son sang. Calixte était quand même quelqu’un d’important à ses yeux, même si elle savait moins le montrer qu’avec Edward. Il gardait cet aspect très… extrême avec les mutants, qu’elle ne pouvait pas avoir elle, à cause de l’autre…

Non, il ne fallait pas y penser. Elle secouait doucement sa chevelure, sa tête, pour oublier, pour ne pas s’y attarder. Elle risquait de faire une erreur, à l’avoir quelque part dans le fond de son esprit.

Discrétion ne serait pas un terme qu’elle accolerait au nom de son frère. Alors, l’inquiétude perça, à nouveau. Elle s’approcha doucement, posa ses doigts sur son bras. Les sourcils se levaient, question silencieuse sur pourquoi il n’était pas venu directement. Elle le connaissait assez pour savoir qu’il aimait l’attention, qu’il aimait être au centre de tout, comme il le prouvait encore aujourd’hui. Faire quelque chose, ce n’était guère étonnant, il n’aimait pas rester à se tourner les pouces… « Je ne t’ai pas entendu en effet, tu aurais dû me faire appeler. » Rentrer seul, mais quelle idée stupide… Elle aurait dû être là, elle ou Edward. Juste quelqu’un, pour l’aider, pour l’accompagner. Certes, le monde avait continué à tourner en son absence, mais ils restaient sa famille. Et si Alice était occupée ailleurs, avec l’organisation de l’événement, cela ne signifiait en rien qu’elle ne se serait pas libérée pour son frère. D’ailleurs, d’un geste, elle indiqua à ses associés du jour de continuer de continuer. « Rentrons Calixte. A moins que tu ais besoin de prendre l’air ? » Pour une fois, il aurait le droit de choisir. Tant que ce n’était rien de très extravagant… Elle pouvait l’accompagner, dans les hectares autour du manoir… Personne ne viendrait les déranger. Pas de paparazzis, pas de photos volées. Sinon, les magazines comprendraient la douleur de faire face à Alice, toujours aussi bonne manipulatrice…

S’amuser… Elle ne s’amusait pas vraiment, et son regard s’assombrit brutalement, loin de l’insouciance dont elle se parait habituellement. « Je suis passée te voir à l’hôpital. Et j’ai vu… Les familles, les malades, les dégâts de cette soirée, au-delà de ce que j’imagine. » Pause. « Alors, il fallait faire quelque chose. Je fais quand même partie d’une des familles les plus importantes, et si je ne supporte pas les événements mondains, me servir de mon nom pour avoir un impact est normal. » Pour manipuler l’opinion publique. Parce que c’était ce qu’ils faisaient, à n’en pas douter. Tout n’était que manipulation, Calixte devait le comprendre cela. Pour protéger les humains, pour protéger les mutants. Pour eux-mêmes. Evidemment.

Puis elle lui proposa un soutien, à l’homme. Elle chercha du regard les cicatrices, les souvenirs de cette terrible soirée, de ces semaines dans le coma, sur son corps. Y avait-il aussi des séquelles morales ? Mentales ? Emotionnelles ? « Comment te sens-tu ? » Question qui tombait sous le sens, mais qu’elle n’avait pas encore posé. Parce qu’elle avait peur de la réponse. Des mensonges.



@H. Calixte Seymour

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Mar 6 Nov - 23:12
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Aux yeux de Calixte, son lien avec Alice était compliqué. Il adorait sa petite sœur, là n’était pas la question, mais tout comme avec Edward, cet amour fraternel était tâché, irrémédiablement tâché de jalousie. Face à Edward, c’était bien simple de comprendre pourquoi : le titre de duc, cette désagréable impression de n’être qu’une roue de secours, qu’un joker conservé dans une manche, voué à y prendre la poussière, pouvait justifier la rancœur et le ressentiment de Calixte. Mais face à Alice… il enviait sa liberté. Il enviait son caractère fort, assuré. Il enviait le regard fier qu’elle suscitait en toute chose dans les yeux de Papa, même quand elle s’opposait à ses décisions, même quand elle osait le mettre face à ses contradictions. Edward et Calixte avaient payé le prix fort de toutes leurs incartades, Calixte davantage encore puisqu’il les avait collectionnées avec soin et détermination ; Alice n’avait eu droit qu’à une indulgence bienveillante, seule fille de la fratrie, petite dernière, petite princesse. Il enviait son aisance à cheval, ses passions poursuivies et reconnues par Papa, encouragées même. Il enviait ce détachement qu’elle avait envers les médias, il lui enviait même ce désir compliqué de fiançailles avec Anthony quand lui devait se résoudre à s’éloigner de Pandora, mis au pied du mur de l’impossibilité de faire ce qu’il voulait de son avenir. Tout ce qu’il pouvait y avoir de différents entre lui et Edward, entre lui et Alice, tout ce qui pouvait le différencier de son grand frère et de sa petite sœur était source de jalousie chez Calixte. Et le temps n’avait rien arrangé à cela.

Aux yeux de Calixte, donc, qu’il était difficile de statuer sur l’état de sa relation avec Alice. C’était sa petite sœur, il voulait la protéger du monde dans son intégralité, il voulait la protéger comme un grand frère était supposé le faire, mais dans un même temps… et bien diable, elle était tout de même assez grande pour se débrouiller toute seule, et il avait déjà suffisamment à faire à se regarder le nombril pour en pas avoir non plus constamment l’œil sur ce qu’elle faisait. Puisque de toute manière, tout ce qu’elle faisait ne pouvait qu’attirer l’approbation de Papa, c’était bien connu. Et entre ce tiraillement, et une attitude insupportable, chez Calixte, il n’y avait qu’un pas. Rentrant de l’hôpital, il la voyait prendre sur elle, s’investir pour une fois, dans tout ce jeu politique des mondanités de l’aristocratie, et tout ce à quoi il parvenait à songer, c’était à comment récupérer à son avantage cet événement qui allait prendre place dans la soirée, ou le lendemain. Rentrant de l’hôpital, il la voyait tournoyer entre les tables et le ballet incessante des installations et des préparatifs, si semblable à Maman, si belle et remarquable, si admirable et source de respect, et tout ce qu’il parvenait à faire dans un premier temps, c’était bouder, se vexer de ne pas être au centre de l’attention et, pire encore, de… et bien de… de ne pas être remarqué.

Pas immédiatement du moins. Trouvant des appuis réguliers, que ce fusse une table, une rambarde ou l’épaule d’une personne, Calixte avança lentement vers sa petite sœur, les yeux jonglant entre les couleurs et les moindres détails auxquels Alice ne pouvait qu’avoir pensé, et la chevelure rousse de sa petite sœur, satisfait de sentir petit à petit les regards s’attarder sur lui. Jusqu’à ce qu’elle se tourne. Le rejoigne. Il l’enlaça avec force, découvrant dans les yeux de sa sœur une inquiétude qu’il avait ignoré avoir jusque-là. Léopold le surveillait, veillait à prévenir toute chute, mais Calixte l’ignora, se concentra sur sa petite sœur. Cherchant le ton qu’Edward savait avoir avec lui, cherchant sans s’en rendre compte à le mimer, le singer, dans une pâle imitation. Calixte oubliait parfois qu’il avait le droit de ne pas forcément chercher à être le portrait exact de son grand frère, ou son parfait opposé. Il oubliait même souvent qu’être simplement lui-même pouvait suffire. Surtout dans le cadre familial. Ils s’éloignèrent un peu, Calixte posa une main sur l’épaule d’Alice pour retrouver son équilibre. Les doigts de sa petite sœur glissèrent sur son bras, éveillant un sourire complice. « Je ne t’ai pas entendu en effet, tu aurais dû me faire appeler. » Il secoua la tête. « Inutile, inutile… Léopold était là pour veiller sur moi, tu le connais… » Léopold, toujours dans leur ombre, surtout à eux deux qui vivaient encore à temps complet dans la résidence secondaire de Killingworth, pour être au plus proche d’Asclepios. Comme un oncle, un ange gardien, un ami, un protecteur. « … et je dois dire que je n’en pouvais plus de ces couloirs… » Il ajouta même à mi-voix, plus pour lui-même que pour Alice. Il n’en pouvait plus d’angoisser à l’idée de croiser Pandora, qui n’avait pas répondu à son dernier message, il n’en pouvait plus de ressasser, encore et encore, leur conversation puis la décision – raisonnable mais douloureuse – qu’il en était venu à prendre après. A tête reposée. Avec le recul – et l’angoisse. Il n’en pouvait plus de ces couloirs immaculés, de ces odeurs aseptisées, de ces médecins qui lui intimaient du repas, qui le forçaient à se lever, à s’allonger, qui émettaient chaque jour davantage de réserves sur les progrès qu’il effectuait, et refusaient de réellement se prononcer sur les séquelles qu’il risquait d’avoir.

Calixte avait voulu prendre l’air. Rentrer chez lui. Et si on ne retenait pas un Seymour qui avait une idée en tête – Alice était extrêmement bien placée pour le savoir – on ne retenait pas plus un Seymour aussi fier que l’était Calixte, aussi têtu qu’il savait si bien l’être, aussi indépendant et colérique que le cadet de la fratrie pouvait l’être. Il avait voulu prendre l’air. Changer d’air. Se sentir utile et non plus un convalescent enfermé dans un hôpital, impuissant, à distance de tous ceux qui cherchaient un coupable, qui offraient leur soutien, qui agissait, comme Alice était en train de le faire, éveillant la jalousie maladive du grand frère. Une jalousie qui n’était pas près de s’amoindrir, voilà qui était certain. Calixte inspira. Ferma les yeux une fraction de seconde, quand un vertige lui rappela que les médecins savaient ce qu’ils faisaient, contrairement à lui. « Rentrons Calixte. A moins que tu ais besoin de prendre l’air ? » Il secoua la tête. Léopold se para d’un sourire moqueur. « Seulement si… » Il embrassa le domaine du regard, les lèvres brûlantes d’exiger une errance choisie entre les tables, les tentes dressées, les plannings prévus ; les yeux envieux et brillants de réclamer une errance choisie dans le parc de la résidence, juste pour ne pas s’enfermer à nouveaux entre quatre murs.

La certitude qu’une dizaine de pas seule lui risquait de lui suffire pour s’effondrer le poussa à faire preuve, pour une fois, d’un peu d’humilité. Calixte souffla « Demain… rentrons. » dans un sourire nerveux de fatigue et de colère envers lui-même. De haine envers celui qui lui avait imposé ça. « Je suis passée te voir à l’hôpital. Et j’ai vu… Les familles, les malades, les dégâts de cette soirée, au-delà de ce que j’imagine. Alors, il fallait faire quelque chose. Je fais quand même partie d’une des familles les plus importantes, et si je ne supporte pas les événements mondains, me servir de mon nom pour avoir un impact est normal. » S’appuyant à la rambarde, il n’avait pas besoin de feindre pour que sa fatigue et son épuisement, ses muscles engourdis de paralysie, ne le ralentissent et ne marquent ses traits, quand ils rejoignirent la véranda où les attendaient des fauteuils. Il s’effondra plus ou moins avec grâce et maintien dans le premier faisant signe à sa sœur de faire de même pour ne pas le laisser seul à l’humiliation que semblait lui imposer son état. Et ne récolta en réponse qu’une question, évidente, douloureuse, ainsi qu’un regard aux allures d’inquisition. « Comment te sens-tu ? »

La porte de la véranda se ferma sous la discrétion de Léopold, leur offrant à tous les deux un peu d’intimité, une bulle de silence et de solitude ; Léopold le connaissait trop bien : Calixte se sentit aussitôt déchargé du manteau de morgue et de fierté, de vanité et d’arrogance, qu’il portait constamment lorsque d’autres virevoltaient autour de lui. Seul, avec sa sœur, loin des regards, des caméras, des journalistes ou simplement des curieux, il s’affaissa de fatigue, l’inquiétude apparut derrière l’hypocrisie et la comédie craquelées toutes deux. Comment te sens-tu. « Tu as eu une bonne idée. Nous avons un nom, de l'argent, de l'influence, il est de notre devoir d'agir. Maman et Papa doivent être fiers de toi. » Il tenta de sourire, de ses sourires qui illuminaient son visage, réchauffaient l’atmosphère, éveillaient sa malice et jouaient, goguenards, à plisser ses paupières et brider ses yeux dans une joie enfantine. Il n’obtint qu’une triste crispation ; l'hypocrisie ne trouvait pas de place dans le cercle familial. « Je suis désolé, Lys, que tu aies eu à… voir ça. » L’hôpital ? Non. A le voir lui, cadavérique. Si les rôles avaient été inversés, Calixte ne savait pas comment il aurait réagi. Ou plutôt, il ne le savait que trop bien : il avait regardé dans les yeux le regard vide d’Abigaël, neuf ans plus tôt. Lys ; contrairement à Edward dont le surnom Eddie n’avait de raison d’être que le plaisir d’agacer l’aîné de leur fratrie, le surnom qu’il confiait à sa petite sœur, lui… n’était que douceur et affection. Réelles. Inquiétude. Souci. Mais affection. « Je suis désolé pour la soirée. Les victimes. » Et pour être désolé, il l’était. Sincèrement. La culpabilité était familière à Calixte, il la côtoyait depuis Abigaël, ne s’en était jamais réellement défait. N’avait jamais réellement réussi à l’éloigner. Et là…

Il la portait à nouveau comme un fardeau. Coupable de ne pas avoir pu protéger tous ses invités, coupable de ne même pas avoir pu être là pour les familles des victimes, coupable d’avoir dormi quatorze jours durant, le temps que funérailles et soins soient donnés, le temps de laisser sa famille dans l’angoisse et la responsabilité. Les mains nerveuses, il se redressa dans le fauteuil. Comment te sens-tu. Mal, naturellement. Il y avait non seulement la santé, mais aussi… tout le reste. Les morts, l’angoisse, la santé de Papa, les inquiétudes de Maman. Il y avait tout cela dont Alice pouvait en être consciente. Et il y avait Pandora. Et le bébé. Comment te sens-tu. Il envisagea de mentir. D’édulcorer la réalité. De protéger Alice de ce qu’il ressentait. Il se souvint in extremis qu’Alice ne serait ni dupe, ni indulgente, s’il s’abaissait à cela.

Il la regarda dans les yeux. « A ton avis, Lys ? Physiquement, je suis dans un état effroyable. Les médecins sont incapables de me dire si j’aurais des séquelles, mes muscles se paralysent encore sans prévenir, s’engourdissent sans cesse, je suis épuisé en quelques pas, et les douleurs musculaires ne me lâchent pas. Psychologiquement… je… » Il y a neuf ans, Alice n’en avait que dix neuf mais elle avait vu son grand frère sombrer dans l’alcool et la drogue, ces quelques mois avant que Papa ne se charge de le remettre dans le droit chemin, ne le force à se concentrer à l’entraînement veilleur, encore et encore pour retrouver un sens à sa vie. Elle n’avait peut-être que dix-neuf ans, mais Calixte savait très bien qu’elle l’avait vu retourner chez le psy, encore et encore, pour se sortir de la tête ses envies suicidaires. Comment allait-il alors qu’il était à nouveau en partie responsable de la mort d’innocents ? Et tout ça à cause des mutations qu’il haïssait, de plus en plus, parce qu’elles se plaçaient à chaque fois en travers de son chemin, entre lui et le bonheur ? « Papa veut que je consulte à nouveau. » Etait-ce un problème ? Non. Mais c’était une réponse comme une autre à la question d’Alice. Question qui, d’ailleurs, en appelait une autre. « Mais toi, comment te sens-tu ? Vis-à-vis de tout ça, vis-à-vis de… Papa… de moi… de l’autre ? » Après tout, Edward ne méritait même pas qu’on le nomme. Même s’il était venu le voir à l’hôpital. Même s’il avait veillé sur lui à l’hôpital. Même s’il avait été là, comme le principal repère de Calixte. « On va attraper ce connard, ne t’en fais pas. Et je m’occuperai de lui. J’en fais une affaire personnelle. ».

Après tout, il avait failli blesser Alice. Helena. Pandora. Le bébé. Calixte n’avait jamais autant souhaité la mort de quelqu’un qu’à cet instant.

 
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Ven 23 Nov - 23:27
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Car nos coeurs sont hantés
Il y a certains évènements qu'on voudrait n'avoir jamais vécus. Qu'on donnerait tout pour oublier. Et qu'on se remémore avec d'horribles pincements au cœur.



L’inquiétude restait profondément ancrée dans le fond des pupilles de la jeune femme, quand elle détaillait avec soin son aîné. L’avoir vu dans un état pitoyable n’aidait pas à effacer les sentiments qui lui serraient le cœur, à présenter un visage calme quand elle souhaiterait, pour une fois, se laisser aller à un amour bien plus fraternel qu’habituellement. Seulement, il y avait du public cette fois-ci. Enfin, comme à chaque fois que Calixte rentrait quelque part elle avait l’impression. Il attirait les regards, les retenait, que ce soit par la réputation qui lui collait à la peau, ou juste par le charisme qu’il dégageait. Elle était plutôt discrète quand on y pensait elle, elle n’allait pas se montrer aux caméras du pays entier. Peut-être parce que les magazines n’étaient pas intéressés par la troisième du nom, petite dernière sur-protégée. Et elle pouvait le comprendre cela, avoir besoin de faire des articles chocs, c’était sur les premiers qu’on les concentrait… Et sur ceux qui offraient de la matière. Enfin, il ne fallait pas qu’elle s’y attarde, il ne fallait pas qu’elle y pense. Là, elle fêtait le retour de son frère en quelque sorte, et lui permettrait de profiter au maximum des jours de repos qu’il allait avoir. On ne se remettait pas d’un coma en claquant des doigts, et le manque d’équilibre de l’autre le prouvait…

Elle s’approcha, prête à le retenir en cas de chute, alors même que Léopold était déjà présent à cette place. L’air frais devait lui faire du pied, mais sans prise, sans assise, il ne resterait pas longtemps dans le jardin. Et puis, il ne fallait pas qu’il tombe malade non plus, Alice ne sachant pas comment les évènements avaient impacté son corps et sa résistance. Bordel, il allait la haïr pour le couver de la sorte…

Elle le guida, le soutint quand il fallut se déplacer, même si chaque mouvement semblait lui demander un effort considérable. « Evidemment, je me doute que Léopold veille sur toi. Mais pour rentrer de l’hôpital… Je suis là pour toi Calixte, tu ne dois pas l’oublier. » Même si parfois ils s’engueulaient, elle le traitait comme un gamin, usant du ton et des gestes de leur mère, elle l’appréciait ce frère qu’elle sentait un peu perdu. Après, Edward et lui avaient un sérieux problème qui lui donnait envie de leur foutre des claques de temps à autre. Ou d’hurler un bon coup, souvent. Le monde était suffisamment cruel pour ne pas qu’ils se marchent sur les pieds en permanence. Et puis… Elle était effrayée de ce jour où la mutation d’Edward sera révélée au grand jour. Car Calixte ne supportera pas cette vérité. Et à cet instant, tout explosera… « Je comprends… » Elle l’avait pris pour elle, la remarque, ne pouvait que compatir, elle qui avait à peine supporté quelques minutes dans les couloirs aseptisés de l’hôpital…

Demain. La réponse était tombée, et Alice l’accepta d’un vague signe de la tête. Pour une fois que Calixte se montrait responsable, autant ne pas le stopper dans ses efforts. « Tu as raison, on fera le tour du domaine après un repos mérité au manoir. » L’hôpital, blanc, froid, ça n’avait pas le même effet sur le sommeil et le moral qu’une nuit chez soi, ça, elle en était persuadée la rousse.

Le chemin fut laborieux, jusqu’à la véranda, jusqu’aux fauteuils les attendant à bras ouverts. Calixte s’écroula rapidement dans l’un d’entre eux, et Alice le rejoignit, sentant dans son geste un besoin d’être soutenu. Qu’il ne prenne pas trop la confiance, qu’il ne s’habitue pas trop, car ce n’était pas un comportement qu’elle aurait tout le temps, bien au contraire. C’était simplement pour ne pas aggraver la situation, elle était capable de s’adapter la gamine…

Bulle d’intimité créée, alors que Léopold les laissait définitivement seuls dans cette pièce. La fierté quitta les regards, la vulnérabilité se dévoila entièrement. C’était l’une des rares fois où tous les deux pouvaient être honnêtes, quand personne n’avait leur regard braquer sur les deux silhouettes… « Je n’ai pas fait ça pour la fierté Cal. Je l’ai fait… Parce que c’était le plus juste. » Pour une fois, ce n’était pas pour l’image, mais parce que ses tripes le lui avaient réclamé. Evidemment, elle avait de la chance de faire partie de l’aristocratie, même si cela impliquait de voir ses actions scrutées en permanence… « Tu n’as pas à t’excuser, tu ne pouvais pas savoir que cette soirée serait l’objet d’une attaque. Tu n’as aucun contrôle dessus, alors, ce n’est pas de ta faute… » Tout ce qui pouvait être reproché, c’était un défaut de protection, mais qui venait plus des policiers et autres forces de l’ordre que de Calixte lui-même. Il devrait en prendre conscience, pour se pardonner à lui-même.

Voir les pupilles ronger par le dégoût, l’inquiétude et la culpabilité, serrait son cœur. Les sentiments pour l’homme avaient beau être mitigés, empreints d’un certain agacement, il restait son frère. Un frère qu’elle se devait d’aimer, auquel elle devait tendre la main, tout en gardant son indépendance. Alice, elle n’était pas du genre à supporter qu’on lui dise quoi faire, sauf dans la situation actuelle. Pour une fois, elle accepterait les critiques acerbes ou les remarques, sans dire un mot. Parce qu’il en avait besoin. Parce que parler, s’exprimer, ne pourrait que l’aider. Même s’il ne fallait pas abuser.

Les doigts s’approchèrent, vinrent se poser sur la main de Calixte, contact léger et tendre pour attester de sa présence. Les mots s’enchaînaient, et peut-être n’avait-elle pas à répondre à ses propos, pas encore.

Et elle le laissa parler, sans l’interrompre. Elle écouta religieusement, regard enfoncé dans les pupilles de son frère. Puis la dernière phrase lui arracha un soupir, et elle s’autorisa enfin à réagir. « Je sais que tu feras tout pour l’attraper. Mais d’abord, fais attention à toi, soigne-toi du mieux que tu peux pour éviter les blessures. » Elle sourit, sincère, preuve d’une maturité étonnante. « Tant que tu n’as pas retrouvé l’équilibre, tu ne feras rien Cal. S’il faut que je te colle aux basques sur les prochaines semaines pour te retenir, crois-moi que je vais le faire. » Et l’obstination, c’était de famille, il le savait bien. « Cela t’aidera de consulter à nouveau ? » Comment lui le percevait ? Si c’était comme une punition, ce serait inutile d’y aller, et elle interférerait en sa faveur. Cette démarche devait venir de Calixte, et seulement de lui.

« Je ne pense pas… Qu’on devrait parler de moi. » Tristesse dans les pupilles. « Ca va. Tant que tu es en vie, tout va bien. » Ne pas s’attarder sur elle, car elle refusait de voir l’impact de la situation sur sa personne. Ses propres faiblesses n’avaient pas à être relevées actuellement…



@H. Calixte Seymour

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Mer 26 Déc - 17:40
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Car nos coeurs sont hantés

   alice & calixte
 
 
 
Etrange famille que celle des Seymour, où les frères se détestaient et couvaient leur petite sœur, où les parents exigeaient le trop de leurs enfants pour espérer avoir le assez, mais ne s’en contentaient finalement pas, où la loyauté compensait la complicité, et la fraternité combattait constamment – du côté des aînés tout du moins – la cohésion acquise autour d’un nom, autour d’un héritage, autour d’un devoir commun et d’attentes. Etrange fratrie que celle des Seymour. Il y avait trop de jalousie, trop de malaises, trop de faux-semblants, trop de trop… et, aussi, peut-être des caractères trop forts qui se heurtaient, encore et encore, qui se fendillaient à chaque choc, pour s’endurcir, toujours plus, et devenir paradoxalement encore plus sensibles à chaque respiration. Il y avait de la violence et de la réserve, dans les liens qui rattachaient les Seymour les uns aux autres. Et Calixte et Alice n’y faisaient en rien exception : ce ne fut que lorsque la porte de la véranda se ferma derrière eux et que Calixte s’écroula dans un fauteuil, abandonnant au sol sa fierté et son arrogance pour s’autoriser à être un peu lui-même en présence de sa sœur, qu’il toucha du bout du doigt un soupçon de sincérité.

Si l’inquiétude d’Alice avait ce petit quelque chose de rassurant et de touchant, caressant l’orgueil de Calixte dans le bon sens du poil, la prévention qu’elle déployait, l’attention rivée sur lui dans l’attente qu’il s’effondre, qu’il trébuche… tout cela avait bien au contraire le don d’agacer et d’irriter Calixte, trop susceptible pour son propre bien. Il se sentait infirme, il se sentait faible. Renoncer à errer dans le parc du manoir, renoncer à se pavaner, à se montrer, à s’incruster dans les travaux d’Alice pour se les approprier, lui voler la vedette et satisfaire son ego… c’était si pénible, si douloureux. Si déprimant. Sans parler de tout le reste. Sans parler de tout ce qu’il pouvait avoir en tête, de cette angoisse qui le surprenait dès qu’il s’autorisait à penser et à réfléchir à tout le reste. Sans parler de Pandora. Calixte se prit la tête entre les mains, le temps de lisser sa barbe taillée, redessiner sa mâchoire jusqu’à l’arrondi de son menton. S’efforça à s’arracher à son égocentrisme pour regarder sa sœur dans les yeux, lui offrir un sourire, léger, et quelques compliments choisis, sincères. Pas factices, non. Mais… inattendus. « Je n’ai pas fait ça pour la fierté Cal. Je l’ai fait… Parce que c’était le plus juste. » Ses prunelles se chargèrent de sérieux et de gravité, d’un soupçon de compréhension et se remplirent également de réflexion. Juste. « Je vois. C’est bien. » Bien, cela l’était. Et à parler de justice de la sorte, il ne pouvait que penser à la dispute qui les avait secoués, Edward et lui, le jour même de sa sortie de coma, à cette justice évoquée, celle tuant les mutants incontrôlables crachée par le veilleur blessé, en colère, qui s’était opposée à celle brandie par un avocat agrippé à des livres de lois dépassées par l’évolution de l’humanité. Calixte secoua la tête. Appuya son menton sur le bout de ses doigts dressés en chapiteau, quand ses coudes reposaient, eux, sur ses cuisses. Justice. Y-avait-il une quelconque justice de valable pour le responsable de ce que la presse appelait déjà Poisoned Birthday ? Ou encore pour lui, qui avait ainsi exposé des dizaines de personnes, qui avait tué Abigaël. Qui imposait tout cela à d’autres. Je suis désolé, la culpabilité pressa contre sa poitrine, essouffla ses excuses. « Tu n’as pas à t’excuser, tu ne pouvais pas savoir que cette soirée serait l’objet d’une attaque. Tu n’as aucun contrôle dessus, alors, ce n’est pas de ta faute… » Un faible haussement d’épaule répondit à Alice, Calixte détourna le regard pour le planter sur quelques plantes disposées dans un coin, rentrées le temps de l’hiver, qui attendaient avec impatience le printemps prochain. Il frissonna lorsqu’Alice se pencha dans sa direction pour effleurer sa main. Il frissonna à nouveau lorsqu’il se retrouva tiraillé entre l’envie de rompre le contact et celle de ne surtout plus bouger. Calixte finit par trancher en se redressant, mains nerveuses, dans une volonté sûre de se secouer, de retrouver un peu de son énergie coutumière. Comment allait-il ?

Il ne s’embarrassa d’aucune hypocrisie, d’aucun mensonge, ne se contenta – à la rigueur – que de diluer légèrement la réalité pour mieux l’amoindrir. Comment allait-il ? Mais. Physiquement, psychologiquement, mal. Et ça ne se ressentait pas qu’au niveau des douleurs qui allaient et venaient, qui le saisissaient sans signe avant-coureur, ou cette culpabilité qui l’écrasait brutalement, dans une envie de pleurer et de s’effondrer qui n’était que de loin liée à un excès de faiblesse physique. Quant à sa rémission… on parlait de rééducation, de suivi, de séquelles durables. Et Papa, de son côté, avait évoqué la possibilité que Calixte voie à nouveau, et très régulièrement, la pédopsychiatre qui le suivait depuis l’enfance, ou un autre praticien. Comment se sentait-il ? Mal. Et elle, comment se sentait-elle ? Vis-à-vis de… de tout ce qui secouait les Seymour, de ces aller-retour dans différents hôpitaux, de sa santé et de l’état déclinant de leur père ? Devant le silence d’Alice, il parvint à relever les yeux pour les faire glisser dans sa direction et lui faire une promesse, si elle doutait encore de la colère brûlante de son grand-frère, si elle doutait encore de sa rancune âcre et violente. Ce n’était pas un tendre, Calixte ou, plus exactement, ce n’était pas un généreux et un homme charitable. Ses rancunes étaient tenaces, ses jalousies violentes, ses vengeances mesquines et choisies, parfois cruelles, souvent agressives, jamais oubliées. Et ce Poison Prince ne risquait pas d’y faire exception. Il y avait trop de personnes impliquées, cette fois-ci, pour qu’il continue à tolérer l’immobilisme poli et prudent des Veilleurs, et ce, quoique pouvait en dire Edward.

« Je sais que tu feras tout pour l’attraper. Mais d’abord, fais attention à toi, soigne-toi du mieux que tu peux pour éviter les blessures. Tant que tu n’as pas retrouvé l’équilibre, tu ne feras rien Cal. S’il faut que je te colle aux basques sur les prochaines semaines pour te retenir, crois-moi que je vais le faire. Cela t’aidera de consulter à nouveau ? » S’il avait commencé par sourire devant le soutien et la confiance d’Alice – que c’était agréable d’être dans la position de l’aîné, il fallait le reconnaître – et si son sourire s’affermit devant la maturité de sa si petite sœur, il ne put que se rembrunir lorsqu’elle évoqua ce qu’il avait dit, un peu plus tôt. « Je l’ignore. On ne peut pas dire que jusque-là, il y ait jamais eu d’effets notables. » Sa voix se para d’amertume, alors qu’il savait parfaitement pourquoi il n’y avait aucun effet, pourquoi s’il voyait sa pédopsychiatre comme un véritable soutien et une bouffée d’oxygène, il continuait, à trente ans encore, à voir ses nuits être agitées de cauchemars, de terreurs nocturnes et de cris déchirants, et pourquoi, près de neuf ans plus tard, il continuait à avoir de trop sombres pensées lorsqu’on évoquait Abigaël. Ne rien évoquer qui puisse concerner la Veille et les mutants restreignait – et pas qu’un peu – la compréhension que le docteur pouvait avoir de toutes les pensées qui agitaient Calixte. Alors est-ce que consulter à nouveau l’aidera ? « Tu sais tout comme moi que les suggestions de Papa ont pour la plupart saveur d’ordre et qu’on ne peut ignorer les injonctions du Duc de Somerset. Et j’imagine que si ça ne m’aide pas, ça ne me fera pas de mal pour autant… » Ca n’en restait pas moins préoccupant et révélateur que quelque chose n’allait pas. Et… à ce propos… « Et toi, alors ? » il relança, dans un véritable intérêt.

« Je ne pense pas… Qu’on devrait parler de moi. Ça va. Tant que tu es en vie, tout va bien. » Calixte fronça les sourcils.

On ne pouvait ignorer les injonctions du Duc de Somerset, certes, mais les chiens ne faisaient en rien des chats : Calixte ne supportait que peu que l’on ignore les siennes, et plus encore lorsque le coupable n’était autre que sa petite sœur. Edward, de par son droit d’aînesse, était revêtu d’une certaine inviolabilité digne de celles protégeant de la justice du peuple – en l’occurrence Calixte – la plupart des personnalités politiques en fonction. Mais Alice… Alice n’était que vulnérable à l’égocentrisme, la prétention et la susceptibilité de son grand frère, qui ne tolérait en rien qu’on rejette ses questions avec autant de légèreté. Qui ne tolérait pas, finalement, que l’on lui rappelle sa place et son absence concrète de pouvoir et de position de force. « Si je te pose la question, c'est que j'estime être en droit de te la poser et en droit d’avoir une réponse. », il s’agaça donc, dans un sous-entendu qui ne pouvait être plus clair : s’il était en droit d’avoir une réponse, elle avait de son côté le devoir de lui répondre. « Je suis en vie, certes, mais mon pronostic vital était engagé, quant à Papa, nous savons tous deux qu’il est condamné. » Et ça faisait mal, de le savoir. Mal d’angoisser, encore et encore. « Tu ne peux pas y être indifférente, Alice. Et crois-moi, je suis le mieux placé pour te le dire : tout garder pour toi ne sert à rien, ça n’efface pas pour autant ce que tu ressens, ça ne peut que te rendre vulnérable et fragile. Et ça ne changera rien. Maman a été bien secouée, il semblerait même qu’Edward ait réussi à ressentir un soupçon d’humanité inespérée à cette occasion… donc tu as le droit de ne pas aller bien. Et… bonté divine, tu n’as pas besoin de me mentir, je suis ton grand frère tout de même. » Et si son autorité avait quelque chose de contestable, il avait réellement besoin de la sentir opérationnelle et reconnue. A croire qu’il oubliait que s’il savait être têtu, il n’était qu’un petit joueur face à sa sœur.

 
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