Patient Zero
Dim 1 Avr - 1:46- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Mar 3 Avr - 23:54- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Patient zéro
swann & nikola
« Docteur Stepanovic ? » Je mis un instant à comprendre ce que la personne voulait dire. L’appel m’avait surpris au saut du lit, la sonnerie s’était confondue avec celle de mon réveil, je l’avais presque manqué. Tout ça pour entendre ça. Docteur. C’était mon titre, bien sûr, en tant que détenteur d’un doctorat, mais… je n’étais pas médecin, loin de là, et les deux termes étaient trop associés dans bien des esprits pour qu’ils ne le soient pas dans le mien. « Allo ? » Je me secouai, assis au bord du lit, la tête encore endormie. Allo, oui, c’est bien moi, désolé… Vous êtes ? Mekoća vint poser sa tête sur mes genoux, attiré par ma voix et surtout satisfait de me voir réveillé, et donc autorisé à venir m’embêter. Je me levai, portable calé entre mon épaule et mon oreille, alors qu’on m’expliquait posément qu’on avait besoin de moi, qu’on avait eu mon contact via l’un de mes anciens enseignants à l’université, et que… Je m’interrompis dans la préparation du café que j’avais entamée en même temps qu’il parlait. Pardon ? On avait besoin d’un docteur en psychologie à l’hôpital ? Je fronçai les sourcils, reposai la tasse à moitié remplie et la cafetière, tout en m’appuyant au plan de travail. Vous devez faire erreur, je ne suis pas médecin ou quoique ce soit, juste… La voix s’accéléra de l’autre côté, avec angoisse et nervosité, avec inquiétude aussi et… il était démuni, il ne savait pas qui contacter du coup, et il était surtout désolé de m’avoir dérangé. Sans compter qu’il ne savait plus quoi faire, puisque le médecin venait de partir et qu’il n’était qu’un nouveau en période d’essai et que…
Je l’interrompis dans son monologue, pour lui assurer que oui, j’allais venir et que oui, il pouvait cesser de s’inquiéter. Même si c’était du coup à mon tour de ne pas vraiment savoir dans quoi j’étais en train de m’embarquer. Avaient-ils réellement d’un diplômé d’un doctorat en psychologie, ou avait-il confondu avec un docteur en psychiatrie, ce qui n’avait aucun rapport avec ce que j’étais ? Est-ce que je n’allais pas au-devant d’un quiproquo, d’une confusion, est-ce que je n’étais en pas en train de me faire complice d’une erreur médicale, d’un problème bien plus complexe et risqué, de problèmes tout simplement ? Probablement. Mais je ne pouvais pas laisser ce pauvre secrétaire perdu et anxieux, il fallait que je fasse quelque chose, que je réponde à l’appel comme je pouvais et que j’aille sur place, c’était aussi simple que cela. Un appel suffit pour l’instant à justifier mon absence au travail, je laissai un mot à l’intention d’une Polina encore endormie et courus presque pour ne pas trop le faire attendre.
Quand j’arrivai aux abords de l’hôpital, je n’étais honnêtement pas bien plus avancé. Certes, j’avais eu la confirmation que c’était bien un docteur en psychologie qu’ils avaient en tête, c’était déjà ça de pris, mais j’avais également eu la confirmation que je n’étais clairement pas le plus qualifié pour ce qu’ils souhaitaient. L’enseignant qui avait donné mon contact avait en tête l’élève que j’étais à l’époque, il y avait de cela bien trop d’années maintenant, et n’avait nullement conscience que je n’avais pas fait de psychologie pure depuis… et bien depuis mon master. Facilement. Consultant ma montre, je pris la mesure des quelques minutes d’avance que j’avais réussies à grapiller, et en profitai pour me regarder dans une des vitrines de de la cafétéria de l’établissement. Je n’avais pas vraiment eu, pris ?, le temps d’avoir une apparence soignée. A dire vrai, comme tous mes habits, ma chemise aurait eu besoin d’être un peu plus raccommodée, et mon pull également, élimé par l’âge et ses voyages en Bulgarie, en Croatie, en Europe de l’Est en somme. J’haussai les épaules, me résignai à paraître ainsi, puisque de toute manière, tout cela s’était dans la précipitation, une précipitation propre à me déstabiliser. Pourquoi avais-je accepté de venir, sans avoir pris le temps de réfléchir et de poser les pour et les contre d’une telle invitation qui ne me correspondait en rien ? Parce que je n’avais pas pu laisser mon interlocuteur dans la détresse.
Et même si j’étais bien évidemment incapable de regretter ma décision, je ne pus pas m’empêcher de la remettre, encore et encore, en question lorsque je vis un membre du personnel de l’hôpital se diriger vers moi d’un pas décidé. Un sourire, une main tendue, je la saisis après avoir vérifié que je portais bien mes gants, avec ce que je voulus être un sourire chaleureux. Mr Nikola D. Stepanovic ? Je suis Swann Weavers, je suis chargé de vous assister pour aujourd'hui. Assister ? Je ne m’y attendais pas, et en conséquence de ma surprise, je restai quelques secondes interdits, tout en continuant de serrer la main de l’infirmier. Swann. Avant de me reprendre, de la lâcher et de m’efforcer de détendre mes épaules.Enchanté, vous pouvez m’appeler Nikola, ce sera moins formel. Bien moins formel et c’était ce dont j’avais présentement besoin. Parce qu’honnêtement, je ne savais même pas ce que l’on attendait exactement de moi. On avait besoin de moi, oui, cela je l’avais bien compris. Pour aider une personne souffrant probablement d’un point de vue psychologique, cela également je l’avais intégré. Mais pour le reste… je n’avais ni le nom, ni le sexe, ni l’âge de la personne. Et encore moins la maladie dont elle était affligée. Et qui les avait poussé à m’appeler. Je jetai un coup d’œil en direction de la cafétéria.
Je… j’aurais bien besoin d’un café. Je vous en offre un ? Vous pourrez en profiter pour m’expliquer… un peu… ce qui m’amène ici ? Misère, que je me sentis ridicule en disant cela. De quoi avais-je l’air, à débarquer de cette manière dans un hôpital ? Qu’attendait-on de moi, au juste ?
Je l’interrompis dans son monologue, pour lui assurer que oui, j’allais venir et que oui, il pouvait cesser de s’inquiéter. Même si c’était du coup à mon tour de ne pas vraiment savoir dans quoi j’étais en train de m’embarquer. Avaient-ils réellement d’un diplômé d’un doctorat en psychologie, ou avait-il confondu avec un docteur en psychiatrie, ce qui n’avait aucun rapport avec ce que j’étais ? Est-ce que je n’allais pas au-devant d’un quiproquo, d’une confusion, est-ce que je n’étais en pas en train de me faire complice d’une erreur médicale, d’un problème bien plus complexe et risqué, de problèmes tout simplement ? Probablement. Mais je ne pouvais pas laisser ce pauvre secrétaire perdu et anxieux, il fallait que je fasse quelque chose, que je réponde à l’appel comme je pouvais et que j’aille sur place, c’était aussi simple que cela. Un appel suffit pour l’instant à justifier mon absence au travail, je laissai un mot à l’intention d’une Polina encore endormie et courus presque pour ne pas trop le faire attendre.
Quand j’arrivai aux abords de l’hôpital, je n’étais honnêtement pas bien plus avancé. Certes, j’avais eu la confirmation que c’était bien un docteur en psychologie qu’ils avaient en tête, c’était déjà ça de pris, mais j’avais également eu la confirmation que je n’étais clairement pas le plus qualifié pour ce qu’ils souhaitaient. L’enseignant qui avait donné mon contact avait en tête l’élève que j’étais à l’époque, il y avait de cela bien trop d’années maintenant, et n’avait nullement conscience que je n’avais pas fait de psychologie pure depuis… et bien depuis mon master. Facilement. Consultant ma montre, je pris la mesure des quelques minutes d’avance que j’avais réussies à grapiller, et en profitai pour me regarder dans une des vitrines de de la cafétéria de l’établissement. Je n’avais pas vraiment eu, pris ?, le temps d’avoir une apparence soignée. A dire vrai, comme tous mes habits, ma chemise aurait eu besoin d’être un peu plus raccommodée, et mon pull également, élimé par l’âge et ses voyages en Bulgarie, en Croatie, en Europe de l’Est en somme. J’haussai les épaules, me résignai à paraître ainsi, puisque de toute manière, tout cela s’était dans la précipitation, une précipitation propre à me déstabiliser. Pourquoi avais-je accepté de venir, sans avoir pris le temps de réfléchir et de poser les pour et les contre d’une telle invitation qui ne me correspondait en rien ? Parce que je n’avais pas pu laisser mon interlocuteur dans la détresse.
Et même si j’étais bien évidemment incapable de regretter ma décision, je ne pus pas m’empêcher de la remettre, encore et encore, en question lorsque je vis un membre du personnel de l’hôpital se diriger vers moi d’un pas décidé. Un sourire, une main tendue, je la saisis après avoir vérifié que je portais bien mes gants, avec ce que je voulus être un sourire chaleureux. Mr Nikola D. Stepanovic ? Je suis Swann Weavers, je suis chargé de vous assister pour aujourd'hui. Assister ? Je ne m’y attendais pas, et en conséquence de ma surprise, je restai quelques secondes interdits, tout en continuant de serrer la main de l’infirmier. Swann. Avant de me reprendre, de la lâcher et de m’efforcer de détendre mes épaules.
Re: Patient Zero
Mer 4 Avr - 20:27- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Dim 15 Avr - 12:06- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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swann & nikola
Pendant une fraction de seconde, j’eus l’impression d’avoir fait une bêtise. Trop de familiarité dans mon attitude, peut-être ? Ou alors peut-être ma tenue était-elle trop guindée, pas assez, tout simplement inadéquate ? Etais-je en retard, avais-je sur le visage une marque involontaire, créée par mon usage inconscient d’une mutation ? Qu’est ce qu’il clochait actuellement chez moi, pour qu’il reste silencieux, pour qu’il me regarde avec cet air interdit, presque perdu, figé, en équilibre entre deux réactions ? Pendant une fraction de seconde, j’eus la certitude d’avoir fait une bêtise. Je tentai de me rattraper, proposai un café sans grande conviction, sans parvenir à me départir de cette impression confuse d’être parfaitement hors propos. Et ridicule. Misère, pourquoi donc avais-je accepté de venir, pourquoi donc m’étais-je jeté dans ce piège évident, dans le piège évident de cet altruisme que mes parents m’avaient inculqué dès le plus jeune âge ? Pendant une fraction de seconde, je me sentis me liquéfier. Guettant une réaction de sa part, guettant n’importe quoi, mais au moins une réaction. Je me mordis la lèvre. Et enfin, enfin mon interlocuteur se fendit d’un sourire, sincère, qui me permit de respirer à nouveaux. Dans ce cas ce sera Swann pour moi, Nikola. Je suis partant pour le café, j'ai eu le temps de lire un peu le dossier en vous attendant, je vais vous expliquer. Une main nerveuse passée dans les cheveux, j’articulai à mi-voix un merci qui n’avait pas vraiment de sens, le suivis vers la cafétéria qui nous attendait un peu plus loin. Le café s’avérait être plus qu’un bon moyen d’engager la conversation et de dissiper ma nervosité, le café s’avérait – et les premières odeurs fortes le confirmèrent- être une nécessité. Nous nous intercalâmes dans la file d’attente, je pris le temps de regarder autour de moi avec attention et anxiété, cherchant sans savoir quoi un moyen de me détendre, de trouver un équilibre précaire entre mes doutes et ma bonne volonté, entre cette volonté constante de supprimer ce qui me dérangeait et la crainte de le faire réellement. Le silence était à nouveau là, entre Swann et moi. Docteur en psychologie et incapable d’entamer la conversation, je n'avais aucune crédibilité et je me demandai de plus en plus ce que je faisais là. Réellement. Pourquoi donc m’avait-on appelé moi, hein, dans cette affaire ? Pourquoi moi, parmi tant d’autres ? Avait-on réellement confondu psychiatre et psychologue, n’était-ce qu’une vaste et pas vraiment drôle blague qu’on me jouait, ou une confusion et… mes doigts allèrent chercher un peu de monnaie au fond de ma poche, un prétexte pour ne pas rester bras ballant et justifier – ne serait-ce qu’un minimum, mon silence. Pas un grand bavard, non, je n’étais pas un grand bavard. Malgré tous mes efforts, les seuls sujets que je me voyais aborder pour le moment étaient liés à la météo, à la climatisation et au chauffage de l’hôpital et éventuellement le métier exercé par Swann. Des sujets que je n’osai même pas lancer, non. Finalement, alors qu’une personne devant nous commençait à prendre son temps pour choisir, revenant sans cesse sur sa décision et provoquant une vague d’agacement dans la file d’attente, Swann finit par rompre un silence de plus en plus gênant.
Pour être honnête, j'ai appris que j'allais vous assister seulement à mon arrivée ce matin. J'ai eu le temps de parcourir un peu le dossier, mais je pense que les choses seront plus claires lorsque nous y serons. Je fronçai les sourcils.C’est… inhabituel, comme précipitation ne pus-je que faire remarquer. Nous étions tous les deux pris de court, et même si je n’avais pas un bon instinct pour toutes ces choses-là, j’avais le pressentiment que toute cette affaire cachait autre chose. Quelque chose de plus qu’un simple besoin d’un docteur en psychologie. Parce que dans les faits, je n’allais pas l’ausculter, ce patient, j’allais simplement lui parler, mes compétences s’arrêtaient là, et pour ça, je n’avais pas vraiment besoin d’un assistant. Surtout d’un assistant aussi décontenancé que moi. Non ? Je fronçai les sourcils, et quand il entrouvrit le dossier pour y jeter un œil, je ne pus m’empêcher de faire de même, d’apercevoir le visage d’un enfant, d’un adolescent, pas majeur à n’en pas douter, ce que Swann ne tarda pas à me confirmer. C'est un adolescent sujet à des crises d'angoisses. Jusque-là c'est pas grand-chose, mais il s'avère que c'est un mutant. Je sentis ma gorge se nouer, quelque part dans mon dos, le tatouage que l’on m’avait apposé quelques mois plus tôt me brûla comme pour se rappeler à mes souvenirs. Savait-il ? Le professeur qui m’avait recommandé, savait-il que… Mutant ? Une question qui n’en était pas une, je ne me fis que l’écho de ses propos. Il semblerait que son don soit de générer des illusions, de les rendre tangibles en bref. Je ne l'ai pas encore rencontré, il s'appelle Andrew Brown et il a quinze ans. J'imagine qu'il n'avait peut-être même pas conscience de son don. Ce ne sont que des suppositions, mais lorsqu'il est arrivé aux urgences, il souffrait de migraines également. Donc en soit, on peut se demander si les crises ne sont pas plutôt une conséquence de sa mutation... J’hochai la tête, sans renchérir pour autant. Ce n’était pas le moment, ni le lieu, et encore moins… les circonstances ? Quoiqu’il en soit, que l’on ait fait appel à moi pouvait avoir plus de sens, tout en perdant en cohérence. Les mutants, leurs mutations, tout cela était consigné dans mon dossier, au DCRM, et normalement, on nous avait promis une confidentialité stricte de son contenu. Et je n’avais parlé de ma mutation à personne, seules Irina et Polina étaient au courant, et… Je secouai la tête pour cesser d’y penser. Pas le moment.
Re-bonjour Rosita, je voudrais un cappuccino vanille avec deux doses d'expresso et... Vous prendrez quoi ? Un coup d’œil aux possibilités, un coup d’œil aux prix surtout, de chaque produit. Par réflexe, mon regard et mon choix s’orientèrent vers le plus simple, le moins cher, le plus discret et normal :Juste un café, sans sucre. le plus simple me retins-je même d’ajouter, dans un sourire, alors que je sortais l’appoint et le tendais à la barista dans un merci et un sourire poli. Le bonne journée ! qui réceptionna et suivit notre commande ne fut pas bien plus marqué, prononcé de cette voix douce et presque inaudible qui était la mienne, et je nous dirigeai vers un angle de la cafétaria, un peu à l’écart et surtout à distance des autres. Pas une grande affluence à cette heure-là, nous pûmes trouver sans difficulté une table sans voisin direct. Et j’attendis que nous soyons assis pour reprendre et tendre une main interrogative vers le dossier qu’il tenait. Je peux ? Je sortis mes lunettes, les posais sur mon nez d’un geste lent et précis. Je comprends un peu mieux pourquoi on a fait appel à moi, je crois. S’il est un mutant, et si le responsable connaît mon ancien professeur, il a dû penser qu’un psychologue mutant serait le plus à même de le gérer. J’offris à mon vis-à-vis un sourire crispé, sans savoir si je guettais davantage de la crainte que du mépris dans son regard. S’il a quinze ans, il n’a pas dû être dépisté… Le DCRM est-il déjà passé ? j’imagine qu’on a dû l’envoyer du côté de l’antenne dépistage… Oui, très certainement. Mais… ce n’était pas l’important. Ça, ce n’était que des formalités au final. L’important, c’était plutôt de connaître le terrain sur lequel j’allais m’aventurer. Puisqu’il n’était vraiment plus question de faire marche arrière maintenant. Swann… je dois savoir. Est-ce que cela vous pose problème ? Ma question resta en suspens le temps d’une respiration, avant que je ne la complète. Que ce soit un mutant ?
Pour être honnête, j'ai appris que j'allais vous assister seulement à mon arrivée ce matin. J'ai eu le temps de parcourir un peu le dossier, mais je pense que les choses seront plus claires lorsque nous y serons. Je fronçai les sourcils.
Re-bonjour Rosita, je voudrais un cappuccino vanille avec deux doses d'expresso et... Vous prendrez quoi ? Un coup d’œil aux possibilités, un coup d’œil aux prix surtout, de chaque produit. Par réflexe, mon regard et mon choix s’orientèrent vers le plus simple, le moins cher, le plus discret et normal :
Re: Patient Zero
Jeu 19 Avr - 16:44- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Lun 30 Avr - 16:57- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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J’ouvris le dossier sans plus tarder, sitôt installés à l’une de ces tables de la cafétéria qui présentaient le double avantage d’être discrètes, dans un coin de la pièce, à l’écart et surtout entourée de tables similaires et inoccupées. J’ouvris le dossier, dans un mouvement hésitant, je pris le temps de sortir mes lunettes, d’en déplier les branches et de les poser sur mon nez, comme pour m’octroyer encore quelques secondes de répit. Des secondes bien vite dispersées. Il n’y avait guère d’informations, outre les principales – âge, sexe, raison de l’admission dans les services – et d’un entrefilet sur sa mutation estimée, sur ses applications et surtout sur les démarches déjà effectuées : rien qui n’impliquât le DCRM, contre toute attention. Mon regard se fit hésitant, incertain, interrogateur, avant que je ne le contraigne à plus de détente et de chaleur. Ce n’était pas de la faute de mon interlocuteur et, au final, peu importait de toute manière le taux de complétion du dossier : la seule nature du petit pouvait expliquer, d’une manière ou d’une autre, ma venue. Du bouche-à-oreille, un peu d’intuition… le résultat de mon dépistage, mon tatouage, ma prise de contact avec mes anciens professeurs pendant ma recherche désespérée d’un emploi stable, ces traductions que j’avais recommencé à faire pour arrondir mes fins de mois… il n’était guère compliqué, en creusant un peu dans ma vie, de trouver trace de mon appartenance à cette minorité de la population qui causait bien des émeutes. Je refusais de me cacher, je refusais de m’exposer, je voguais dans un entre-deux incertain et discret. Et aujourd’hui, ça me rattrapait. Avec raison. C’était lucide, d’une certaine manière, de confier à un mutant avec des compétences en psychologie le soin de calmer un enfant perdu, aux capacités incongrues et inconnues. Sur le papier, dans une théorie lisse et rodée, c’était ce que l’on pouvait peut-être faire de mieux. Mais dans les faits… je lançai un regard à Swann en l’entendant s’étouffer devant ma conclusion, je lui lançai un regard inquiet, de prime abord – il n’allait quand même pas s’étouffer réellement devant moi ? J’avais beau avoir le titre de docteur, j’ignorai tous des mesures de premier secours… - puis interrogatif : qu’avais-je dit pour obtenir une telle réaction ?
La réponse était évidente, même pour moi. Surtout pour moi. je la mis cependant de côté, le temps de terminer ma phrase, d’aller au bout de mon raisonnement et de ma pensée. Le dossier n’était pas complet, ou alors il n’était pas à jour : le patient devait forcément avoir été approché à un moment ou à un autre par le DCRM, en dépit de son jeune âge. Il devait, également, avoir été dépisté réellement pour confirmer la mutation, et… je m’interrompis. Brièvement. Repensai à sa réaction, et je me rendis compte que je ne pouvais vraiment pas ne pas en tenir compte pour le moment, ne pas la considérer avec la gravité qu’elle exigeait. Ma question resta en suspens une seconde, je la complétai, je l’explicitai non sans une certaine appréhension. Et le silence que j’obtins en retard accentua d’un cran encore ma nervosité. Je croisai les bras sur ma poitrine, comme pour me refermer, je les ouvris pour aller chercher le café, compenser ma nervosité en bougeant, en occupant mes mains d’une manière ou d’une autre. Je ne devais pas le forcer à répondre, et il était même particulièrement déconseillé de chercher à anticiper ses réactions, à présupposer de ses pensées. Déconseillé, contreproductif, dangereux et limité. Pourtant… le silence s’attarda, gagna en densité, je me brûlai les lèvres le temps d’une gorgée, puis d’une seconde.
Malaise croissant, bien évidemment. Avais-je fait un faux pas ? Très certainement. Après tout, le gouvernement anglais insistait depuis le début pour offrir au DCRM une neutralité exemplaire, une confidentialité exacerbée des résultats, et si le dépistage était obligatoire, la liberté était encore présente dans la possibilité de refuser le tatouage, et d’ainsi en exposer le résultat. J’en avais vu qui brandissait un lambda, un espilon ou une autre lettre grecque avec fierté, quand d’autres proclamaient leur droit au silence, à un refus catégorique d’une marque. Alors oui, peut-être ma question était-elle trop intrusive, dans une société qui voulait garder pour elle-même les opinions de chacun ? Ou alors peut-être avait-il eu une mauvaise expérience avec un mutant, et qu’il craignait que l’on remette son impartialité en question ? Peut-être considérait-il mes doutes comme une agression envers sa liberté, son libre arbitre, sa liberté de pensée, ou peut-être encore qu’il… oh. Son avant-bras se posa sur la table, manche retroussée, dévoilant un… kappa. Même si je ne me souvenais plus de la signification de cette lettre, ce n’était pas un lamba.Oh… oui… Ce n’était en rien une réponse. Mais c’était un début de compréhension du pourquoi de sa réaction. Je vois Et je voyais bien. Je suis dans le même cas que vous, Nikola. Je me suis également demandé s'il s'agissait de la raison pour laquelle on m'a mis sur ce cas. Bien qu'honnêtement, je doute d'être d'une grande aide, même si par miracle je parvenais à contrôler ma mutation, je ne vois absolument pas en quoi elle pourrait être utile. Oh. Je reposai ma tasse dans un mouvement légèrement gêné, c’était bien plus de réponse que ce que je n’en demandais et à présent, j’eus la réelle impression d’avoir été intrusif. Son sourire crispé chercha à me détendre, je lui répondis par un sourire également, voulu rassurant. Alors non, le fait qu'il s'agisse d'un mutant ne me dérange pas. Mais je mentirais si je disais que ça ne me touche pas. Moi-même je ne contrôle pas ma propre mutation, une part de moi se dit que j'aurais tout à fait pu me retrouver à sa place, bien que je n'atteigne pas un niveau aussi grave. Être capable de matérialiser des illusions ? Il y a de quoi être effrayé.
Un acquiescement. Etre effrayé par son propre potentiel, je pouvais le comprendre, je pouvais même parfaitement le comprendre. Parce que mon potentiel, j’en avais vu et utilisés les pires recoins sous les exigences d’Irina, j’avais arraché des vies, des souvenirs, j’avais arraché jusqu’aux moindres sens de l’esprit de certaines personnes. Et je continuais à le faire, lorsque je n’y prenais pas garde, me recroquevillant derrière des gants pour bloquer un contact qui n’était même pas requis pour agir. J’en profitai pour réajuster mes gants, à ce propos. Pour tirer sur mes manches. Est-ce que vous pensez que nous avons été mis sur ce cas uniquement parce que nous sommes... différents ? Sa question me sortit de mes pensées, me fit aussi remarquer que j’étais plongé dans le silence, ce silence que j’imposais si souvent à mon entourage, perdu dans mes réflexions et cette absence complète de besoin de parler, de communiquer d’une quelconque manière. Je me mordis la lèvre, remuai le peu de café qu’il restait au fond de la tasse, un peu de café signifiant que nous allions bientôt devoir y aller. Mais d’abord…Honnêtement, Swann, je n’en ai aucune idée, et je n’aime pas vraiment me fier à mes intuitions pour me faire une opinion. Ça peut tout à fait n’être qu’une coïncidence, tout comme c’est un choix qui pourrait raisonnablement avoir été fait consciemment. Je… je ne peux vous montrer mon tatouage, il… Ma main monta à mon épaule, descendis vers l’omoplate où l’on avait inscrit dans ma chair le psi des psychologistes. Et non des psychologues. Quoiqu’il en soit, nous sommes certainement les mieux placés pour tenter de le comprendre, quelle que soit notre situation à chacun face à notre… particularité. Et cette discussion prenait une direction des plus désagréables, je me levai en refermant le dossier. Nous devrions y aller, ils vont finir par nous attendre. Vous ne pensez pas ? Cette question, posée par pure politesse, attendait malgré tout une réponse de la part de Swann, ce qui ne m’empêcha pas pour autant de me saisir de la tasse vide de Swann, ainsi que de la mienne, pour les ramener au bar : la perspective de les laisser sur la table pour qu’un serveur les ramasse m’avait toujours dérangé, et malgré mes années d’errance dans les Balkans, rien n’avait changé.
Hors de la cafétéria, je fis signe à Swann de me devancer : je ne connaissais de l’hôpital que les premiers niveaux, de ceux qui avaient pu m’héberger à l’occasion d’un stage ou deux. Il y avait bon nombre d’années de cela maintenant. Et… Qu’avait dit Swann un peu plus tôt ? Je le retins in extremis, alors qu’on allait quitter le hall.Swann, je… je dois vous prévenir que je ne contrôle pas non plus. Pas vraiment. C’est sans danger, mais… si vous sentez quoique ce soit d’inhabituel dans votre esprit, éloignez-vous juste de moi, d’accord ? La seule perspective de se tenir près d’un petit mutant, de devoir potentiellement agir volontairement… Je préférai prendre les devants. Le prévenir, même si aux yeux du DCRM, ma mutation se cantonnait à la disparition de la sensation de fin, et il valait mieux pour moi que cela ne change en rien.
La réponse était évidente, même pour moi. Surtout pour moi. je la mis cependant de côté, le temps de terminer ma phrase, d’aller au bout de mon raisonnement et de ma pensée. Le dossier n’était pas complet, ou alors il n’était pas à jour : le patient devait forcément avoir été approché à un moment ou à un autre par le DCRM, en dépit de son jeune âge. Il devait, également, avoir été dépisté réellement pour confirmer la mutation, et… je m’interrompis. Brièvement. Repensai à sa réaction, et je me rendis compte que je ne pouvais vraiment pas ne pas en tenir compte pour le moment, ne pas la considérer avec la gravité qu’elle exigeait. Ma question resta en suspens une seconde, je la complétai, je l’explicitai non sans une certaine appréhension. Et le silence que j’obtins en retard accentua d’un cran encore ma nervosité. Je croisai les bras sur ma poitrine, comme pour me refermer, je les ouvris pour aller chercher le café, compenser ma nervosité en bougeant, en occupant mes mains d’une manière ou d’une autre. Je ne devais pas le forcer à répondre, et il était même particulièrement déconseillé de chercher à anticiper ses réactions, à présupposer de ses pensées. Déconseillé, contreproductif, dangereux et limité. Pourtant… le silence s’attarda, gagna en densité, je me brûlai les lèvres le temps d’une gorgée, puis d’une seconde.
Malaise croissant, bien évidemment. Avais-je fait un faux pas ? Très certainement. Après tout, le gouvernement anglais insistait depuis le début pour offrir au DCRM une neutralité exemplaire, une confidentialité exacerbée des résultats, et si le dépistage était obligatoire, la liberté était encore présente dans la possibilité de refuser le tatouage, et d’ainsi en exposer le résultat. J’en avais vu qui brandissait un lambda, un espilon ou une autre lettre grecque avec fierté, quand d’autres proclamaient leur droit au silence, à un refus catégorique d’une marque. Alors oui, peut-être ma question était-elle trop intrusive, dans une société qui voulait garder pour elle-même les opinions de chacun ? Ou alors peut-être avait-il eu une mauvaise expérience avec un mutant, et qu’il craignait que l’on remette son impartialité en question ? Peut-être considérait-il mes doutes comme une agression envers sa liberté, son libre arbitre, sa liberté de pensée, ou peut-être encore qu’il… oh. Son avant-bras se posa sur la table, manche retroussée, dévoilant un… kappa. Même si je ne me souvenais plus de la signification de cette lettre, ce n’était pas un lamba.
Un acquiescement. Etre effrayé par son propre potentiel, je pouvais le comprendre, je pouvais même parfaitement le comprendre. Parce que mon potentiel, j’en avais vu et utilisés les pires recoins sous les exigences d’Irina, j’avais arraché des vies, des souvenirs, j’avais arraché jusqu’aux moindres sens de l’esprit de certaines personnes. Et je continuais à le faire, lorsque je n’y prenais pas garde, me recroquevillant derrière des gants pour bloquer un contact qui n’était même pas requis pour agir. J’en profitai pour réajuster mes gants, à ce propos. Pour tirer sur mes manches. Est-ce que vous pensez que nous avons été mis sur ce cas uniquement parce que nous sommes... différents ? Sa question me sortit de mes pensées, me fit aussi remarquer que j’étais plongé dans le silence, ce silence que j’imposais si souvent à mon entourage, perdu dans mes réflexions et cette absence complète de besoin de parler, de communiquer d’une quelconque manière. Je me mordis la lèvre, remuai le peu de café qu’il restait au fond de la tasse, un peu de café signifiant que nous allions bientôt devoir y aller. Mais d’abord…
Hors de la cafétéria, je fis signe à Swann de me devancer : je ne connaissais de l’hôpital que les premiers niveaux, de ceux qui avaient pu m’héberger à l’occasion d’un stage ou deux. Il y avait bon nombre d’années de cela maintenant. Et… Qu’avait dit Swann un peu plus tôt ? Je le retins in extremis, alors qu’on allait quitter le hall.
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Ven 4 Mai - 14:08- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Dim 13 Mai - 23:20- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Aurais-je pu me passer de cette mise en garde ? Très certainement. Mais… mais il y avait cette angoisse de perdre encore une fois le contrôle, il y avait la peur, la peur réelle, la peur tangible d’agir sans le savoir, sans m’en rendre compte, de marquer des esprits sans même sourciller, dans une indifférence née de l’ignorance. Aurais-je pu me passer de cette mise en garde ? Très certainement. Officiellement, mais j’ignorais combien de temps mon mensonge tiendrait à mes pertes de contrôle – je ne pouvais supprimer que la sensation de faim, potentiellement d’autres sensations, et pour des durées très courtes. Officiellement, il n’y avait rien de plus inoffensif que cette mutation psychologique, tatouée dans mon dos pour que je ne m’en impose pas la vue tous les matins. Officiellement… mais officieusement, c’était tout autre chose. Aurais-je pu me passer de cette mise en garde ? La réponse était simple, je n’avais pas le droit de me leurrer : non, je n’aurais pas pu m’en passer. Parce que ça aurait été mal, d’aller me confronter à un mutant aux capacités aussi diffuses que les miennes, aussi incontrôlées que les miennes, sans même songer une seule seconde aux conséquences que tout cela allait pouvoir avoir sur moi. Et sur le petit. Et sur cet infirmier qui n’avait rien demandé à personne, de toute évidence. Tout comme moi. Tout comme le petit… Mes yeux croisèrent les siens, j’y cherchai de la peur, de l’appréhension, de l’incompréhension, quelque chose pouvait me donner une piste sur ce à quoi il était en train de penser. Le sourire qui flotta sur ses lèvres fut de loin la réaction à laquelle je m’attendais le moins. Et celle à laquelle, naturellement, je ne m’étais pas préparé. Je ne sus tout simplement pas comment réagir, son Aucun problème Nikola. Je vous laisse me suivre, c'est par là. restant sans réponse, et me laissant même complètement immobile pendant une fraction de seconde.
Me reprenant, je le suivis dans les couloirs. C’était tout ? Aucune problème, c’était tout ce qu’il trouvait à dire ? Avais-je été trop adroit dans mes propos, trop confiant, trop assuré, avais-je paru à ce point détendu pour qu’il n’ait même pas le moindre mouvement de recul ? Ou au contraire, n’en avait-il pas tout simplement parce que la sienne, de mutation, lui assurait une protection quelconque, ou alors… Mes pensées voltigeaient sans trouver de port d’attache, comme une panique latente qui n’allait rien provoquer de bon dans les minutes à venir. Le temps de rejoindre un étage, un couloir et enfin une porte, je me contraignis à davantage de calme. C’est sans danger, lui avais-je assuré, il n’en tenait qu’à moi que ça le reste, que ça reste aussi inoffensif que ça l’était inscrit sur mon dossier. Il poussa la porte, je restais en retrait. Et laissai toute ma réserve de côté en voyant l’enfant, parce qu’il avait beau avoir déjà quinze ans, il n’était qu’un enfant à mes yeux, prostré sur son lit. Visage caché derrière ses bras et ses genoux repliés. Terrifié. Je jetais un nouveau coup d’œil au dossier pour conforter mes souvenirs, avant d’avancer.Andrew ? Ma voix résonna dans la pièce, sans provoquer le moindre mouvement de sa part. Je lançai un regard hésitant à Swann, avant de récidiver. Andrew ? Je peux entrer ? Pas de réponse, je m’octroyai donc le droit de poser un pied dans la chambre. Et de m’approcher de lui. Je m’appelle Nikola. Je suis… Je m’interrompis, prenant conscience de justesse qu’il serait sûrement malvenu de me présenter comme un psychologue. J’hésitais, suffisamment longtemps pour l’intriguer, et capter un regard dans ses bras croisés. Je suis comme toi. On m’a dit de… Comme toi, il releva instantanément la tête. Et dans son regard, je me rendis compte qu’il n’y avait pas seulement de la peur, mais plus que ça encore. Une terreur absolue, et un regard qui ne se portait pas uniquement sur moi, mais sur quelque chose, derrière moi. Un frisson glacé se répandit sur mon épaule, je me retournai d’un bond devant ma sœur, ma sœur jumelle, plus vraie que nature, qui me toisait avec morgue. Et qui n’avait aucune raison d’être là. Je voulus la repousser, mes doigts transpercèrent la brume qui disparut sans se faire prier. Je pris mon inspiration, pour contrôler la peur mêlée de surprise qui faisait battre mon cœur à toute vitesse. D’un regard, je m’assurai de l’intégrité de mes gants, d’un autre, je consultai Swann. Alors qu’il aurait fallu que tout de suite, je me reprenne, que tout de suite, je rassure le petit. Je pris mon inspiration. Pourquoi ma sœur ? S’il faisait des illusions, pourquoi avait-il matérialisé ma sœur telle qu’elle était habillée sept ans plus tôt ?
Je me forçai à sourire. Pour dédramatiser la situation. Pour qu’il ne prenne pas mon mouvement de panique comme une sanction.Je te présente ma sœur. Je ne pensais pas l’avoir invitée… c’est toi qui as fait ça ? Ça m’a fait plaisir de la revoir… Ma voix sonnait faux, mon sourire sonnait faux. Mais il fallait que ce soit juste, il fallait que tout paraisse normal, il ne fallait pas qu’il apprenne à avoir peur de ce qu’il faisait. Et il ne fallait pas que je lui apprenne à en avoir peur, non plus. Je peux m’asseoir ? Je fis signe à Swann d’entrer à son tour. Parce que revoir Irina… ça avait été revoir l’un des cauchemars que je faisais encore. Et si les illusions du petit étaient liées à ses peurs… et à nos peurs…
Me reprenant, je le suivis dans les couloirs. C’était tout ? Aucune problème, c’était tout ce qu’il trouvait à dire ? Avais-je été trop adroit dans mes propos, trop confiant, trop assuré, avais-je paru à ce point détendu pour qu’il n’ait même pas le moindre mouvement de recul ? Ou au contraire, n’en avait-il pas tout simplement parce que la sienne, de mutation, lui assurait une protection quelconque, ou alors… Mes pensées voltigeaient sans trouver de port d’attache, comme une panique latente qui n’allait rien provoquer de bon dans les minutes à venir. Le temps de rejoindre un étage, un couloir et enfin une porte, je me contraignis à davantage de calme. C’est sans danger, lui avais-je assuré, il n’en tenait qu’à moi que ça le reste, que ça reste aussi inoffensif que ça l’était inscrit sur mon dossier. Il poussa la porte, je restais en retrait. Et laissai toute ma réserve de côté en voyant l’enfant, parce qu’il avait beau avoir déjà quinze ans, il n’était qu’un enfant à mes yeux, prostré sur son lit. Visage caché derrière ses bras et ses genoux repliés. Terrifié. Je jetais un nouveau coup d’œil au dossier pour conforter mes souvenirs, avant d’avancer.
Je me forçai à sourire. Pour dédramatiser la situation. Pour qu’il ne prenne pas mon mouvement de panique comme une sanction.
Re: Patient Zero
Ven 18 Mai - 17:10- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Jeu 31 Mai - 21:57- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Elle se tenait devant moi. Avec son sourire aux lèvres, amusé, comme avant, avec de la fureur dans les yeux, des prunelles glacées me hurlant sans discontinuer tous les reproches qu’elle pouvait me faire, et me faire à juste titre. Elle se tenait devant moi, spectre de mes cauchemars, plus vraie, plus tangible, plus concrète que jamais. Nous faisions la même taille, elle me dépassait même, inexactitude tirée de mes regrets qui me hantaient trop souvent la nuit. Nous faisions la même taille, à la blondeur de mes cheveux brunis par le soleil, répondaient celle éclatante, lumineuse, de ses mèches longues. A mes lèvres entrouvertes de surprise, répondaient les siennes, pincées, mutines. A mon immobilité tétanique, répondait sa respiration, qui soulevait lentement sa poitrine à un rythme léthargique. Je tendis la main vers Irina, incapable de me retenir, je tendis la main pour l’effleurer, pour y croire, ne pas y croire, démuni face à la soudaineté de son apparition, partagé entre la lucidité et l’envie d’y croire, écartelé entre la raison et la crainte de la savoir réelle, l’appréhension de.. mes doigts la frôlèrent, elle disparut aussitôt, brisant le temps dans un hoquet étouffé. Me laissant immobile et tremblant. Je fermai brusquement le poing, fermai les yeux, aussi, alors que le temps reprenait son cours, dans les battements effrénés de mon coeur et cette panique latente qui ne demandait qu’à être relâchée, qu’à être libérée sous la forme désirée par mon inconscient : une destruction complète de tous ces souvenirs, de tout ce qui pouvait me toucher, me faire du mal… je tirai sur mes gants pour les ajuster, protection illusoire, avant de me tourner, dans un sourire crispé, vers celui à l’origine de tout cela. Je cherchai du soutien du côté de Swann, fis taire toutes les questions qui menaçaient mon calme, qui ne pourraient faire que plus de mal que de bien… soufflai péniblement quelques mots, comme si tout ce qu’il se passait ici n’était qu’une démonstration des plus attendues de la normalité du monde. Une routine, n’est-ce pas ? Je déglutis, me concentrai pour ne surtout pas transmettre ma panique, pour ne surtout pas braquer le petit, le heurter, le blesser, pour ne surtout pas lui faire croire, lui faire comprendre qu’il était dangereux. Ce n’était qu’une illusion, après tout, ce n’était qu’une simple, qu’une petite, qu’une toute petite illusion, rien, vraiment rien de dangereux. Juste ma soeur. Que je n’avais pas vu depuis quelques années maintenant, que j’avais rendue orpheline plus de quinze ans plus tôt, rien de grave. Rien de bien dramatique. Cela m’avait-il réellement fait plaisir de la voir ? Je pris mon inspiration, poursuivis en tirant une chaise, en faisant signe à Swann d’entrer à son tour. De ne pas me laisser seul, seul face à un possible retour d’Irina, ou pire, de… d’autre chose. Qu’est-ce qui guidait les manifestations du pouvoir du petit ? Je n’osai pas poser la question. Je préférai plutôt retrouver mon calme, vraiment. Pour le préserver des dégâts. Ne pas le transformer en dommage collatéral de sa propre mutation, ne pas le mettre dans une situation qui le pousserait à se défendre. Bonjour Andrew, je m'appelle Swann. Moi aussi, je suis... Comme toi. La blouse que je porte, c'est parce que travaille ici en tant qu'infirmier, mais je possède également un don qui, parfois, me provoque de mauvaises surprises. Je jetai un coup d’oeil en direction de Swann, souris à son rire, le remerciai d’un regard pour la légèreté qu’il s’imposait également malgré les circonstances, malgré le silence et la méfiance du garçon. Je me surpris à penser que tout allait s’apaiser, vraiment.
Grossière erreur. Andrew fixa Swann, je suivis son regard, me figeai face à la personne qui venait d’entrer, me levai même dans un seul mouvement, comme pour… Tu n'es qu'un monstre. Swann blêmit, mes lèvres voulurent articuler quelques mots mais ma gorge resta sèche de stupeur. Et avant que je ne parvienne à réagir, à dire quoique ce soit, la personne s’évapora à son tour, mes épaules s’affaissèrent de soulagement, mêlé de nervosité et de cette tension qui ne semblait pas vouloir me quitter. Je reculai, sans pouvoir m’en empêcher, cherchant des traces d’Irina. Je reculai, alors que ce n’était en rien ce qu’on attendait de moi, ce que l’adolescent attendait de moi, ce qu’il fallait faire. Je reculai, parce que je ne me sentis ni capable de gérer tout ça, ni capable d’y faire face. Swann posa la question qui planait depuis la première illusion. Je... Tu... C'est toi qui as fait ça ? Andrew hocha la tête, je me sentis pâlir davantage encore.
Il doit y avoir un moyen de contrôler la mutation, qu'il puisse faire apparaître des choses plus... plaisantes. S'il est terrifié par elle, ça peut être logique qu'il matérialise ce qui lui fait peur, ou... ce qui nous fait peur. Ce fut à mon tour d’opiner du chef, sans trop y croire. Toutes les mutations n’ont pas nécessairement un potentiel plaisant, je suis le mieux placé pour le croire. Et si, et si Andrew n’avait la capacité que de créer le pire, d’inspirer le pire, d’extirper le pire ?C’est logique je soufflai malgré tout, pour faire illusion à mon tour, pour rassurer Andrew, pour m’en convaincre, aussi. Ne t'en fais pas, nous allons trouver une solution... N'est-ce pas Nikola ?
Non. Je déglutis. Souris, encore.Bien sûr ! Et je voulus y croire. N’avais-je pas moi-même appris à trouver une solution pour éviter de tout détruire, pour ne pas reproduire encore et encore les mêmes catastrophes ? Je me forçai à sourire, me forçai à me détendre. C’est logique d’avoir peur, d’être effrayé face à l’inconnu, et la surprise mais je t’assure que tu n’as pas à avoir peur. Essaye de… comprendre ce que tu fais, quand tu le fais, et… Une silhouette se dessina derrière le petit. Même attitude, même démarche, même vêtement, même visage qu’un peu plus tôt. Irina… Non, ce n’était pas ma soeur, juste le rappel, la matérialisation de ce dont j’avais peut-être le plus peur. Mais ce n’était pas ma soeur, il fallait que je me le répète. Je me forçai à l’ignorer, et à recentrer mon regard sur le petit. Est-ce que tu sais… est-ce que tu arrives à sentir ce que tu es en train de faire ? C’était la première étape, après tout. Intellectualiser l’instinctif, mettre des sensations sur l’inconscient, c’était ce qu’Irina m’avait poussé à faire, dans nos courriers. Et Irina, d’ailleurs, l’ombre d’Irina, acquiesça à mes propos. Je me sentis coupable d’y puiser les mots suivants, tirés tout droit des lettres de ma soeur, des années plus tôt. Essaye de ressentir, tu as forcément un lien avec… avec elle, ou avec moi, puisque… Le regard du petit chercha mes rétines, me coupa le souffle. Irina s’avança, comme tout à l’heure, leva la main, tendant les doigts pour me toucher le torse. ... arrête, arrête ça tout de suite, éloigne-la de moi. Je me sentis déraper, dans des mots qu’il ne fallait pas que je prononce, dans une peur que je n’aurais jamais dû montrer. Je reculai, heurtai Swann, sentis ma mutation se déployer comme un réflexe défensif.
Ce n’était pas ma soeur, pas ses reproches, ce n’était pas ma soeur. Mais c’était elle, jusque dans sa démarche, dans son assurance, dans sa rancune. J’eus un mauvais pressentiment, ouvris ma blouse comme ma chemise pour dévoiler ma clavicule, obscurcie par des taches rappelant de l’encre se diluant dans un verre d’eau, l’eau étant actuellement ma peau. Et l’encre, des traces qui, au lieu de se déliter, s’assombrissaient lentement mais sûrement.Swann, re… recule s’il te plaît. Irina vacilla, s’approcha davantage. Andrew, essaye de… essaye de la rappeler. Ce n’est qu’une illusion, tu la contrôles, c’est ton esprit qui crée ça, tu es… tu en es le maître. J’essayai d’être rassurant, mais j’eus beau faire, je sentis ma voix s’affaiblir.
Parce que malgré tous mes conseils, malgré tous les conseils d’Irina, je ne parvenais personnellement pas à ressentir réellement les effets de ma mutation, juste les mouvements en surface, juste ce tiraillement que je ne parvenais pas à cesser et qui m’indiquait que j’étais en train d’agir. De détruire. Quelque chose. Quoi ? Je l’ignorai, je l’ignorai vraiment. Certainement ce que mon inconscient jugeait présentement comme étant le plus dangereux. Le plus agressif. Irina vacilla. Et le petit hoqueta.Je ne sens plus rien ! Je ne la sens plus... Sa voix rauque et pourtant si juvénile me fit sursauter. Je me tournai vers Swann, à nouveau à la recherche d’un peu d’aide : à côté de lui se tenait l’homme de tout à l’heure.
Grossière erreur. Andrew fixa Swann, je suivis son regard, me figeai face à la personne qui venait d’entrer, me levai même dans un seul mouvement, comme pour… Tu n'es qu'un monstre. Swann blêmit, mes lèvres voulurent articuler quelques mots mais ma gorge resta sèche de stupeur. Et avant que je ne parvienne à réagir, à dire quoique ce soit, la personne s’évapora à son tour, mes épaules s’affaissèrent de soulagement, mêlé de nervosité et de cette tension qui ne semblait pas vouloir me quitter. Je reculai, sans pouvoir m’en empêcher, cherchant des traces d’Irina. Je reculai, alors que ce n’était en rien ce qu’on attendait de moi, ce que l’adolescent attendait de moi, ce qu’il fallait faire. Je reculai, parce que je ne me sentis ni capable de gérer tout ça, ni capable d’y faire face. Swann posa la question qui planait depuis la première illusion. Je... Tu... C'est toi qui as fait ça ? Andrew hocha la tête, je me sentis pâlir davantage encore.
Il doit y avoir un moyen de contrôler la mutation, qu'il puisse faire apparaître des choses plus... plaisantes. S'il est terrifié par elle, ça peut être logique qu'il matérialise ce qui lui fait peur, ou... ce qui nous fait peur. Ce fut à mon tour d’opiner du chef, sans trop y croire. Toutes les mutations n’ont pas nécessairement un potentiel plaisant, je suis le mieux placé pour le croire. Et si, et si Andrew n’avait la capacité que de créer le pire, d’inspirer le pire, d’extirper le pire ?
Non. Je déglutis. Souris, encore.
Ce n’était pas ma soeur, pas ses reproches, ce n’était pas ma soeur. Mais c’était elle, jusque dans sa démarche, dans son assurance, dans sa rancune. J’eus un mauvais pressentiment, ouvris ma blouse comme ma chemise pour dévoiler ma clavicule, obscurcie par des taches rappelant de l’encre se diluant dans un verre d’eau, l’eau étant actuellement ma peau. Et l’encre, des traces qui, au lieu de se déliter, s’assombrissaient lentement mais sûrement.
Parce que malgré tous mes conseils, malgré tous les conseils d’Irina, je ne parvenais personnellement pas à ressentir réellement les effets de ma mutation, juste les mouvements en surface, juste ce tiraillement que je ne parvenais pas à cesser et qui m’indiquait que j’étais en train d’agir. De détruire. Quelque chose. Quoi ? Je l’ignorai, je l’ignorai vraiment. Certainement ce que mon inconscient jugeait présentement comme étant le plus dangereux. Le plus agressif. Irina vacilla. Et le petit hoqueta.
- Spoiler:
- Le "je ne sens plus rien", dans ma tête, c'est que Nikola a détruit le lien entre Andrew et ses illusions genre, il perd le contrôle et elles ont une autonomie pendant quelques secondes
Re: Patient Zero
Mar 12 Juin - 11:35- Swann Weaverschronologiste
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Ven 29 Juin - 0:07- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Patient zéro
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Le contrôle. Qu’y-avait-il de plus important, à cet instant, que le contrôle qu’on pouvait avoir, tous les trois, sur notre corps, sur notre mental, sur nos pulsions, nos instincts, nos envies et ces capacités qui malmenaient notre ADN, nous rendant plus dangereux que quiconque. Le contrôle, il n’y avait rien de plus important que le contrôle. Et pour un diplômé en psychologie, un docteur en psychologie, il aurait été fou d’oublier à quel point le moindre petit détail pouvait prendre de l’ampleur, dans les circonstances adéquates. Montrer la peur qui me tenaillait face à Irina était aussi dangereux que la masquer dans son intégralité, contrôler mes sourires, mes angoisses, était aussi dangereux que de leur laisser champ libre, rester silencieux était aussi dangereux que me faire trop volubile dans mes propos… Il fallait que je me contrôle, il fallait que je me concentre, ce n’était même pas envisageable de ne pas le faire. De ne pas y parvenir. Ce n’était pas envisageable, parce que j’étais déjà en déséquilibre et qu’il était hors de question que dans mes errances, je bouscule également les deux autres mutants présents dans la pièce. Je pris mon inspiration, chassai de mon regard le fantôme d’Irina, me forçai à respirer. Sourire aux propos de Swann, qui avait semblait-il bien plus les pieds sur terre que je ne pouvais les avoir. Sourire, également, au petit, pour ne surtout pas l’effrayer. Rester calme, rester lucide… Je m’efforçai de sourire, de me détendre, ne rationaliser ce qu’il se passait pour mieux décortiquer ce qu’il fallait faire. Pendant une fraction de seconde, j’eus la folie de croire que tout allait bien se passer : la silhouette de ma sœur se découpa une seconde fois dans la pièce. Ce n’était pas Irina, malgré le murmure qui se faufila aussitôt hors de mes lèvres, je voulus cesser de la regarder, mes rétines se posèrent sur le petit. Rationaliser. Décortiquer. Ressentir, c’était le premier pas, et c’était ce qu’Irina elle-même m’avait forcé à comprendre et à faire. Essayer de savoir ce que l’on faisait, quand on le faisait. On ne pouvait pas créer sans contrôler, on ne pouvait pas émettre sans ressentir, nos pouvoirs étaient les nôtres, le contrôle était lové au cœur de notre mental, au cœur de nos sensations. Que m’avait écrit Irina, déjà ? Que tout cela n’était qu’un muscle demandant à être entraîné, que des sensations ne demandant qu’à être découvertes, apprivoisées et cajolées ? Les yeux rivés dans ceux du petit, je cherchai ma voix la plus douce, la plus ferme, la plus confiante pour mieux le mettre lui en confiance. Un bien bel espoir, une bien belle tentative. Vain et vaine tous les deux. Lorsqu’Irina s’approcha, tendit la main dans ma direction, je cédai à la panique, brutalement, saccageant tous mes efforts sans pouvoir me retenir. Je voulus retrouver mon équilibre du côté de chez Swann, je ne pus que le heurter dans mon mouvement de reculer, dans mon mouvement de fuite, et tout ce que je demandais à Andrew, tous mes beaux discours de contrôle, de ressentir, et d’absence de peur, tout cela vola en fumée lorsque je sentis au fond de moi ma mutation réagir comme un réflexe de défense, comme une autoprotection enclenchée par ma panique, par l’inquiétude de retrouver ma sœur, comme un interrupteur basculé pour libérer un instinct primaire, sauvage, irrationnel.
Incontrôlable. Elle se déploya, sans limite, sans que je ne parvienne à la retenir. Elle se déploya, réflexe défensif, un regard à ma clavicule m’apprit qu’un tatouage la recouvrait, rongeait mon épiderme sur mon épaule, se répandait sans donner signe de rétractation. Ma respiration s’accéléra : il ne fallait pas que Swann m’approchait, il s’agissait de limiter les dégâts, il s’agissait de me mettre en quarantaine, de fuir, de… Je tentai de calmer un Andrew auquel je transmettais ma panique, je tentai de trouver une solution, en vain. Irina vacilla, le petit hoqueta, et derrière mon allié se trouvait à nouveau l’apparition qui lui était attachée, devant mes pupilles dilatées d’inquiétude. Une inquiétude qui ne put que croître lorsque l’apparition percuta le réel, propulsa Swann que je tentai par réflexe de rattraper ; réflexe inutile puisqu’il reprit bien rapidement ses appuis et son équilibre.Swann ! Je joignis les mains avant de les séparer, comme pour mimer ce que je voulais que ma mutation fasse, séparer, éloigner les illusions, un concept futile puisque je ne touchais que les psychés. Et que les psychés n’étaient pas à ma portée consciente à cet instant. Que pouvais-je faire ? Rien, si ce n’était empirer les choses. Et c’était ce que je faisais, d’ailleurs. C’était… je me décalai pour faire rempart entre l’homme apparu et Andrew, et… Je clignai des yeux. Ne reste pas là abruti. Je voyais double ou… Mais non, ma mutation s’apparentait à de la destruction, uniquement à de la destruction : je ne créais rien, contrairement à ma jumelle, je ne créais rien, contrairement à Andrew, je me contentais de détruire, de piétiner, et de ne pas comprendre. De ne comprendre ni comment tout cela fonctionnait réellement, ni ce qui était en train de se produire sous mes yeux, dans une duplication de l’infirmier que je n’avais pas vu venir et qui, pourtant, était belle et bien là. Sous mes yeux. Un double réel, un double indépendant, un double tangible, comme me le confirma sa main posée sur mon bras pour me tirer hors de la trajectoire d’Irina, réapparue, encore, à proximité de ma terreur. Toi aussi, tu devrais bouger de là. Je ne suis pas persuadé que ce soit une bonne idée de les laisser vous toucher. J’acquiesçai, avant de jeter un regard à Andrew. Terrifié. Recroquevillé sur lui-même, mains plaqués sur les oreilles, yeux fermés, comme pour nous faire disparaître, comme pour mieux me montrer l’étendue des dégâts causés. Je secouai la tête. Ce n’est qu’une illusion, elle ne peut pas me faire du… Mes rétines accrochèrent les traces laissées par un contact sur la poitrine de l’infirmier. Et la fin de ma phrase mourut dans ma gorge. Je répétai, pour m’en convaincre. Ce n’est qu’une illusion, tout cela n’est qu’une vaste illusion. Née de nos peurs, nourrie par la capacité d’Andrew, mais juste une illusion, rien qui ne puisse… Je m’interrompis, l’œil attiré par un mouvement Andrew, alors qu’Irina et l’autre apparition cherchaient à nous acculer dans un coin de la pièce, nous forçant à reculer et à nous éloigner de la porte. Le lien, tu parlais d’un lien… il a disparu Je déglutis, additionnant sans y penser les éléments de l’équation, la résolvant, comme une douleur dans la poitrine. J’avais brisé le lien. J’avais, vraisemblablement, détruit ce qui reliait le mutant à ses créations, et le contrôle qu’il était supposé avoir sur elles. Je fermai les yeux, le temps de respirer. Swann, je… les illusions ne peuvent pas se maintenir longtemps toutes seules, non ? Je… Lequel des deux était Swann, et pourquoi, pourquoi y-avait-il deux illusions matérialisant ses angoisses ? Avait-il peur de lui-même, ou… Irina vacilla.
Devint translucide. Et finit par disparaître, comme évaporée. L’autre, celui qui avait traité Swann de monstre, disparut également. Et le jumeau, lui, resta. Je jetai un coup d’œil en direction d’Andrew, toujours terrifié, sans aucun progrès, sans aucun de ses progrès qu’on avait attendu de moi. Etais-je capable de l’aider ? J’en doutais, à cet instant, j’en doutais très fortement. Mes mains, tremblantes, réclamaient que je fuie, que je fuie loin de cette pièce, loin de l’hôpital, loin de tout contact humain pour mieux reprendre le contrôle. Mais mon regard accrocha, encore et encore, les deux Swann face à moi, indifférenciables à mes yeux. Perturbant. Revint sur Andrew, qui chancelait. D’un bond, je me précipitai sur lui, plus par réflexe et par besoin d’une diversion que par réelle lucidité.Andrew ! Il s’effondra comme poupée de chiffon, je pris son pouls avec inquiétude, le trouvant sans problème, tout comme sa respiration. Il est inconscient, il faut… il faudrait prévenir le personnel soignant et… Le jumeau de Swann n’avait toujours pas disparu. La coupure que j’avais faite sur ses illusions était-elle à ce point définitive pour que même l’inconscience du petit ne la supprime pas. D’un index tremblant, j’essayai de désigner celui que j’estimai être la copie. Comment… comment se fait-il qu’il soit encore là ? Normalement… Oh… oh mais qu’est-ce que j’ai fait… Je reculai dans un coin de la pièce, craignant de perdre davantage encore le contrôle.
Et incapable de retrouver la moindre lucidité. Il fallait appeler les infirmiers et les médecins, oui, mais il y avait déjà un infirmier sur place. Il fallait que je m’isole, que je me recroqueville sur moi-même, que je tente de sentir l’action de ma mutation pour mieux la réprimer, oui, mais j’ignorai jusqu’à la nature exacte de la suppression que je venais d’effectuer. J’ouvris ma blouse, remontai ma manche pour dévoiler mon épaule tatouée, à l’encre noire, si noire et si mate que je ressentis le besoin paniqué et douloureux de la comparer aux autres tatouages qui ne s’effaçaient pas. Les autres suppressions définitives, semblait-il, que j’avais pu appliquer.Je crois que j’ai fait quelque chose de mal… de très mal…
Incontrôlable. Elle se déploya, sans limite, sans que je ne parvienne à la retenir. Elle se déploya, réflexe défensif, un regard à ma clavicule m’apprit qu’un tatouage la recouvrait, rongeait mon épiderme sur mon épaule, se répandait sans donner signe de rétractation. Ma respiration s’accéléra : il ne fallait pas que Swann m’approchait, il s’agissait de limiter les dégâts, il s’agissait de me mettre en quarantaine, de fuir, de… Je tentai de calmer un Andrew auquel je transmettais ma panique, je tentai de trouver une solution, en vain. Irina vacilla, le petit hoqueta, et derrière mon allié se trouvait à nouveau l’apparition qui lui était attachée, devant mes pupilles dilatées d’inquiétude. Une inquiétude qui ne put que croître lorsque l’apparition percuta le réel, propulsa Swann que je tentai par réflexe de rattraper ; réflexe inutile puisqu’il reprit bien rapidement ses appuis et son équilibre.
Devint translucide. Et finit par disparaître, comme évaporée. L’autre, celui qui avait traité Swann de monstre, disparut également. Et le jumeau, lui, resta. Je jetai un coup d’œil en direction d’Andrew, toujours terrifié, sans aucun progrès, sans aucun de ses progrès qu’on avait attendu de moi. Etais-je capable de l’aider ? J’en doutais, à cet instant, j’en doutais très fortement. Mes mains, tremblantes, réclamaient que je fuie, que je fuie loin de cette pièce, loin de l’hôpital, loin de tout contact humain pour mieux reprendre le contrôle. Mais mon regard accrocha, encore et encore, les deux Swann face à moi, indifférenciables à mes yeux. Perturbant. Revint sur Andrew, qui chancelait. D’un bond, je me précipitai sur lui, plus par réflexe et par besoin d’une diversion que par réelle lucidité.
Et incapable de retrouver la moindre lucidité. Il fallait appeler les infirmiers et les médecins, oui, mais il y avait déjà un infirmier sur place. Il fallait que je m’isole, que je me recroqueville sur moi-même, que je tente de sentir l’action de ma mutation pour mieux la réprimer, oui, mais j’ignorai jusqu’à la nature exacte de la suppression que je venais d’effectuer. J’ouvris ma blouse, remontai ma manche pour dévoiler mon épaule tatouée, à l’encre noire, si noire et si mate que je ressentis le besoin paniqué et douloureux de la comparer aux autres tatouages qui ne s’effaçaient pas. Les autres suppressions définitives, semblait-il, que j’avais pu appliquer.
Re: Patient Zero
Lun 16 Juil - 20:56- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Lun 20 Aoû - 0:03- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Patient zéro
swann & nikola
Tout n’allait, au final, que de mal en pis. Je n’avais pas l’impression d’aider, bien au contraire, tout se délitait autour de nous, du contrôle sommaire qu’Andrew avait pu avoir sur ses capacités à même sa seule santé, tout s’effondrait dans des ruines et un vacarme assourdissant, tout se consumait dans le tourbillon de mes capacités, de cette perte de contrôle née de ma terreur et de mon aveuglement, née de la folie qui m’avait poussé à croire que je pourrai être utile, ici, auprès d’un jeune qui passait non seulement par les mêmes étapes d’errance que celles que j’avais pu traverser main dans la main avec Irina, mais qui en plus faisant face aux regards scrutateurs des médecins inquiets et d’un monde hostile aux êtres dangereux comme nous on pouvait l’être. Et moi, je débridais ses capacités en tentant de les atrophier, et moi, je ne voyais nul autre moyen d’arranger la situation qu’en étant celui-là même qu’il craignait de devenir. L’angoisse enfla dans ma poitrine, se déployant autour de nous comme ma mutation, détruisant sous le coup de l’impulsion les limites, coupant les liens, ces liens mêmes qui reliait Andrew à ses créations, ces liens mêmes qui nous reliaient à nos plus sombres cauchemars. Du moins, c’était ce dont j’étais convaincu lorsque je me tournai vers Swann. Et que tout dégringola une nouvelle fois dans mes convictions. Parce qu’alors qu’Irina s’étiolait, une autre entité spectrale semblait gagner en densité, identique en tout point à l’infirmier qui m’avait accompagné jusque-là. Mon souffle s’égara dans ma gorge. Se perdit une fois de plus, avant que je ne puisse réagir de quelque manière qu’il soit, lorsqu’Andrew s’effondra comme une poupée de chiffon, exacerbant dans mes tripes la certitude d’être responsable de tout cela. Je me précipitai à son chevet, non sans noter que la copie de Swann refusait de s’éteindre, refuser de disparaître.
Qu’avais-je fait, une nouvelle fois ? Mes mains tremblèrent, se désintéressèrent du jeune qui était pourtant sous ma responsabilité, je fermai nerveusement mon poing, sans le moindre succès, mon regard allant d’un infirmier à l’autre, d’un visage à l’autre, sans parvenir à se fixer, sans parvenir à contrôler mes mots et la panique qui menaçait de me faire perdre à nouveau la raison, de me faire perdre à nouveau le peu de maîtrise que je pouvais avoir sur cette mutation qui hurlait en mon sein, qui me suppliait de la laisser à nouveau me protéger, comme un tiraillement dans ma poitrine, comme une brûlure sur mon épiderme noirci par le tatouage de la suppression que je venais d’imposer, d’infliger, à un petit qui n’avait rien demandé, à un infirmier qui n’avait rien demandé. Je reculai précipitamment dans un coin de la pièce, délaissant le petit une fois de plus, pour me tenir loin, le plus loin possible, de tous les êtres vivants présents dans la pièce. Le plus loin possible, aussi, de ce double qui refuse de disparaître, de ce spectre qui refuse de s’évaporer et qui s’avance. Je rasai le mur pour m’en éloigner tandis qu’il plaçait un tensiomètre autour du bras d’Andrew, pour mieux surveiller ses constantes, pour mieux… réparer ce que j’avais fait. La lucidité se délitait entre mes doigts, et mon regard paniqué cherchait du secours dans la pièce, sans en trouver : seule la culpabilité m’empêchait à cet instant de céder à cette spirale destructrice que je connaissais si bien et dans laquelle je me lançais dès que je voulais réparer quelque chose. Comme lorsqu’en voulant consoler mes parents, je les avais déchargés de souvenirs, et en voulant les protéger de l’incompréhension, la destruction des albums photos avait provoqué l’incendie qui avait ravagé notre appartement. Comme lorsqu’en voulant soulager Helena de souvenirs, je m’étais totalement effacé de sa mémoire, jusqu’à en déstabiliser près d’une année de sa vie. Mon index pointa un infirmier au hasard, comme pour chercher à me convaincre que tout dérapait. Que ce double aurait dû disparaître. Je... Ça ne vient pas d'Andrew. J'ai un don d'ubiquité assez particulier... Un hoquet de stupeur me secoua.Co… comment ? Don d’ubiquité, sa mutation… je fronçai les sourcils, sans pour autant me décoller du mur, mes pupilles oscillant entre les deux hommes sans interruption alors que l’infirmier continuait à faire son travail. C'est moi la mutation. Mes rétines filèrent dans sa direction, revinrent sur celui que j’identifiais comme étant… l’original ? Vous… vous êtes Swann ? Tous les deux ? Ca n’avait pas de sens. Mais qui donc étais-je pour juger de la pertinence des mutants et de ce qu’elles pouvaient provoquer, surtout à cet instant ? Et à cette pensée, mes doigts vinrent ouvrir nerveusement ma blouse, auscultèrent la noirceur du tatouage qui continuait de grapiller un peu de mon épiderme, à un rythme si lent qu’il en était imperceptible. Mais bel et bien présent. J’étais en train de faire quelque chose de mal. De très mal. Encore. Nikola, est-ce que c'est votre mutation qui a provoqué tout ça ? Si c'est le cas, vous n'avez pas à vous en vouloir, mais vous devez me le dire, si nous n'agissons pas vite, il risque de tomber dans le coma et je ne peux pas prendre le risque de le réveiller tant qu'on n'en sait pas davantage. Je gardai les yeux rivés sur le lit où respirait lentement Andrew. Sa vie était-elle en danger ? Je ne sais pas… je murmurai sans y penser. Je ne savais pas ce que j’avais fait, je ne savais pas quelles conséquences il y avait, je ne savais… rien d’autre que cette certitude que j’avais détruit quelque chose. Et même bien des choses. Nikola... En quoi consiste votre mutation ? Combien de temps fait-elle effet ? Une nouvelle fois, je secouai la tête. Je… je ne sais pas J’étais à nouveau l’adolescent de seize ans, démuni face à sa sœur étrangère, ses parents brisés, sa petite sœur perdue. J’étais incapable de raisonner. Incapable de réfléchir. Incapable de mettre en œuvre tous les conseils que j’avais pu me croire en droit de donner à Andrew un peu plus tôt. Je me laissai glisser le long du mur en me prenant la tête entre les mains. Dans un soupir. Avant de regarder à nouveau l’infirmier le plus proche de notre patient. Je suis un psychologiste Voilà qui me semblait être un bon point de départ. Je détruis. Je détruis tout Voilà qui me semblait être un bon point d’arrivé, incompréhensible et pourtant si juste. Je pris une inspiration pour calmer les battements erratiques de mon cœur. Ma sœur jumelle, Irina… Ma main désigna le vide, désigna sa silhouette évaporée. … elle est capable de créer. Une idée, une sensation, un besoin, un souvenir, une émotion… Elle était capable d’instiller la peur, la panique, la douleur, de leurrer les sens, de créer des souvenirs précis, diffus. Des certitudes. Moi, je… je ne fais que détruire, détruire tout ça. Sans le moindre contrôle, chuchotaient les non-dits de mes propos. C’est un mécanisme de défense. Qui cible… ce qui me met en danger. Je n’étais pas vraiment capable de maîtriser ce que je faisais, je n’étais qu’un enfant dans les mains duquel on avait posé un branchage enflammé et qui, le laissant traîner derrière lui, déclenchait un incendie. Je crois que j’ai brisé le lien entre Andrew et… et ses illusions. Je murmurais, mes doigts glissant sur mon épaule, l’écorchant comme pour faire disparaître le tatouage délateur. Je… je crois que c’est définitif. Et je me mordis l’intérieur des joues pour éviter un sanglot humiliant. Pour me forcer à me taire, aussi, pour garder en moi-même ce que je voulais dire.
J’étais un monstre, un monstre de la pire espèce. Et je voulus, brutalement, remonter le temps et revoir le sourire d’Helena pour me stabiliser, retrouver cet équilibre qui garantissait le calme de cette mutation violente dont j’étais l’hôte chétif.
Qu’avais-je fait, une nouvelle fois ? Mes mains tremblèrent, se désintéressèrent du jeune qui était pourtant sous ma responsabilité, je fermai nerveusement mon poing, sans le moindre succès, mon regard allant d’un infirmier à l’autre, d’un visage à l’autre, sans parvenir à se fixer, sans parvenir à contrôler mes mots et la panique qui menaçait de me faire perdre à nouveau la raison, de me faire perdre à nouveau le peu de maîtrise que je pouvais avoir sur cette mutation qui hurlait en mon sein, qui me suppliait de la laisser à nouveau me protéger, comme un tiraillement dans ma poitrine, comme une brûlure sur mon épiderme noirci par le tatouage de la suppression que je venais d’imposer, d’infliger, à un petit qui n’avait rien demandé, à un infirmier qui n’avait rien demandé. Je reculai précipitamment dans un coin de la pièce, délaissant le petit une fois de plus, pour me tenir loin, le plus loin possible, de tous les êtres vivants présents dans la pièce. Le plus loin possible, aussi, de ce double qui refuse de disparaître, de ce spectre qui refuse de s’évaporer et qui s’avance. Je rasai le mur pour m’en éloigner tandis qu’il plaçait un tensiomètre autour du bras d’Andrew, pour mieux surveiller ses constantes, pour mieux… réparer ce que j’avais fait. La lucidité se délitait entre mes doigts, et mon regard paniqué cherchait du secours dans la pièce, sans en trouver : seule la culpabilité m’empêchait à cet instant de céder à cette spirale destructrice que je connaissais si bien et dans laquelle je me lançais dès que je voulais réparer quelque chose. Comme lorsqu’en voulant consoler mes parents, je les avais déchargés de souvenirs, et en voulant les protéger de l’incompréhension, la destruction des albums photos avait provoqué l’incendie qui avait ravagé notre appartement. Comme lorsqu’en voulant soulager Helena de souvenirs, je m’étais totalement effacé de sa mémoire, jusqu’à en déstabiliser près d’une année de sa vie. Mon index pointa un infirmier au hasard, comme pour chercher à me convaincre que tout dérapait. Que ce double aurait dû disparaître. Je... Ça ne vient pas d'Andrew. J'ai un don d'ubiquité assez particulier... Un hoquet de stupeur me secoua.
J’étais un monstre, un monstre de la pire espèce. Et je voulus, brutalement, remonter le temps et revoir le sourire d’Helena pour me stabiliser, retrouver cet équilibre qui garantissait le calme de cette mutation violente dont j’étais l’hôte chétif.
Re: Patient Zero
Sam 29 Sep - 4:52- Swann Weaverschronologiste
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Re: Patient Zero
Mar 23 Oct - 23:32- Nikola D. Stepanovicpsychologiste
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Patient zéro
swann & nikola
Bien que la situation pouvait légitimement inspirer une impression contraire, je me connaissais. Vraiment. Je connaissais mes limites, je les discernais avec une acuité née de l'expérience et ces trente années de vie que je traînais derrière moi, comme des chaînes allongées, maillons par maillons, incident par incident, attachées à mes pieds et à mes tatouages. Je connaissais mes limites, je connaissais également mes travers, et plus encore les conséquences de toutes les destructions volontaires et involontaires que je pouvais provoquer. Je me connaissais. Mais ça ne signifiait en rien, et là était le drame, que je me maîtrisais. Et aujourd'hui, Andrew était la victime de ma faillibilité, de mon impuissance, de la malédiction qui pesait sur mes gènes et sur mes veines teintées de noir, teintées de dessin. Une malédiction que j'imposais à Swann, aussi, et à son double - avait-il, d'ailleurs, un prénom qui lui était propre, une identité qui lui était propre, un destin qui lui était propre ?, de la même manière que je l'avais imposée à toute ma famille sans le vouloir, sans m'en rendre compte. Et que je continuais à l'imposer à tous ceux dont je me souciais, ironiquement. Je me mordis la lèvre, dans une inspiration tremblante, dans des explications tremblantes également, alors que mes yeux voguaient d'un Swann à l'autre, sans s'arrêter, sans trouver où se fixer ; comme mes pensées. Destruction. Voilà en quoi consistait ma mutation. Ma soeur pouvait créer. Et moi je détruisais. Comme si nous avions volé à l'autre ce à quoi il aspirait au plus profond de son être : je cherchais la douceur, Irina la vengeance et la revanche, je possédais cette dernière quand elle pouvait d'un simple toucher inspirer des souvenirs apaisants, leurrer les sens et les obnubiler de sérénité. Comme souvent lorsque je parlais de ma mutation, mes doigts glissèrent le long de mes tatouages, cherchant à les faire fuir, à les extraire de ma peau, pour qu'ils disparaissent, pour que leurs conséquences ne soient pas définitives, pour une fois. La détresse s'affaissa sur mon visage, au rythme de mes respirations rapides qui contenaient une panique croissante. Qui contenaient, aussi, la seule conclusion qui valait la peine d'être dite : j'étais un monstre, un véritable monstre, je ne valais guère mieux que toutes les personnes pourvues d'une mutation qui dérapaient, à un moment ou à un autre, pour provoquer dommages et désolation autour d'eux ; comme des cratères de destruction qui tatouaient l'humanité de tristesse et de méfiance.
Je paniquai. Vraiment. Et lorsque l'infirmier commença à parler, toute mon attention se jeta sur lui, sa voix n'étant rien de moins qu'une bouée jetée dans la tempête de mon affolement, battue par les vents violents de mon désarroi. Mais vous pouvez réparer les choses, n'est-ce pas ? Sa question, imprégnée de son calme, laissa dans ma gorge une boule de culpabilité qui me rendit aussitôt muet. Je secouai la tête, de gauche à droite, dans de petits gestes désespérés.Ce n'est pas définitif, normalement mais... je n'ai aucun contrôle... Je n'en avais jamais eu. Malgré tous mes efforts, je n'avais jamais eu la moindre capacité créatrice en moi : ce qui était détruit ne pouvait que se soigner à long terme ou rester brisé, dans des éclats coupants qui s'infectaient parfois, même. Ecoutez, même si vous ne pouvez pas créer une chose qui n'existe pas mais que vous êtes capable de détruire quelque chose d'existant, vous pouvez probablement rétablir les choses en revenant en arrière, ce n'est pas comme si vous inventiez quelque chose de toute part. Mon supérieur va arriver, nous allons trouver une solution pour maintenir Andrew dans l'inconscience sans risquer sa vie, et nous allons réfléchir à une solution calmement, d'accord ? Peut-être que nous pouvons trouvez d'autres issues pour résoudre le problème lié à ses illusions grâce à votre don, par exemple supprimer le vecteur stressant chez lui pour qu'il ne soit plus angoissé... Il voulut poser sa mains sur mon épaule, je reculai d'un mouvement vif, avec dans les yeux un éclat de terreur qui dût être explicite : Je... ne me touchez pas, ça risque d'empirer les choses... je bégayai toutefois, comme pour mieux le mettre en garde. Ce n'était pas pour rien si je portais toujours des manches longues, si j'enfilais également des gants dès que c'était possible sans soulever trop de questions ; je ne maîtrisais pas ma mutation, mais je me connaissais : j'avais appris, presque appris, à vivre avec. A composer avec ce danger constant de blesser quelqu'un, de blesser psychologiquement quelqu'un.
Revenir en arrière ? L'idée traça néanmoins son chemin dans mes pensées, bien malgré moi. Je déglutis. Je fuyais ma mutation, je ne la regardais jamais droit dans les yeux. Je ne sentais même pas toujours lorsqu'elle œuvrait autour de moi, le plus souvent. Grâce à votre don, la phrase résonna, comme en écho, dans mon esprit, alors que son double - Swann² ? - rétorquait, sur un ton que je ne parvins pas à définir. Amusé, sarcastique, moqueur, sombre ? Parce que tu crois franchement que ça suffira ? Si tu supprimes le facteur stressant ça va juste devenir un bon petit psychopathe en puissance. Il n'avait pas tort. Mais moi, j'étais incapable de parler, de prendre position, devant cette altercation, cette dispute entre deux reflets identiques et pourtant si différents, je le voyais bien désormais. Différents dans leurs regards, dans leur posture : le docteur en psychologie qui avait passé des années à rencontrer les personnes, à chercher à les écouter, les comprendre, les aider à se réparer justement, ne pouvait que discerner ces points de contraste que le temps, les secondes et leurs attitudes révélaient. Ferme ta gueule Sis ! Laisser mes études prendre le pas sur ma terreur eut l'effet bénéfique de me rendre davantage curieux qu'effrayé, j'en oubliais presque tout le reste. Y compris la venue prochaine de son supérieur, de celui à qui je devais ma présence aussi, de toute évidence. Je commençai à me détendre, l'attention étant portée sur autre chose que sur moi-même, mais tout vola brutalement en éclat : quand je m'y attendais le moins, Swann² se détourna de l'infirmier pour se placer devant moi : j'eus un nouveau mouvement de recul, le mur et un chariot métallique se liguèrent pour me couper toute retraite.
Il n'avait pas le calme et la bienveillance de Swann. Il n'avait pas cette douceur qu'avait l'infirmier. Il semblait être même aux antipodes de la douceur. Je m'affaissai sous sa colère. Qu'est-ce que tu nous as fait ? Tu sais très bien que y'a pas que le môme qui a été touché alors dis nous ce qui se passe ? Mes lèvres bégayèrentJe ne sais pas, pas exactement tout en lançant un appel à l'aide du côté de Swann. Qui vint se placer à son tour devant moi. Pour me protéger ? Arrête Sis ! Tu vois bien qu'il est complètement dérouté, le stresser risque juste d'empirer les choses !
Je fus forcer de regarder dans les yeux l'état dans lequel tout cela m'avait laissé. J'étais loin, bien loin, trop loin d'une quelconque sérénité salvatrice. Ma mutation réagissait comme un bouclier, comme un animal blessé, et... sur ma main une tâche noire se dessina, s'enroula, dans l'ombre d'une plume duveteuse. Les choses empiraient, réellement. Et les deux Swann continuaient de se disputer, sans que je n'ose les interrompre, sans que je ne parvienne même à envisager de me rappeler à leur bon souvenir. Sans... La porte claqua, une nouvelle personne s'immisça dans la pièce, une nouvelle cible de destruction.
Je déglutis. Encore. Me redressai, aussi. Pour faire illusion.Monsieur... je commençai, même, en replaçant ma blouse correctement sur mes épaules, sur mes bras, serrant le poing pour faire disparaître le nouveau tatouage. Ne me dis pas que tu m'as fait venir pour ça J'ouvris la bouche, restai muet, laissant à Swann le soin d'expliquer. Lâche, j'étais lâche, mais... Il entreprit de clarifier la situation, j'en profitai pour respirer. Pour mettre en application l'ensemble des conseils que j'avais pu prodiguer à Andrew avant que tout ne dérape. Avant qu'Irina n'apparaisse. Avant que je ne ruine tout. Je me décalai, laissant les infirmiers ausculter notre patient inconscient, sans savoir ce que je pouvais faire. Du Nikola assuré qui était venu à l'hôpital une éternité plus tôt, il n'en restait rien. Mes doigts coururent sur le dossier que m'avait donné Swann dès qu'il était venu à ma rencontre, dans l'espoir illusoire de reprendre contenance.
On tendit une main dans ma direction, j'hésitai à la saisir, me résignai à l'ignorer, le poing fermé.Vous êtes le docteur Stepanovic je présume ? Je suis l'infirmier en chef Drax Walsh, je vais administrer a Mr Brown un mégère dose d'adrénaline pour le réveiller et le placer sous sédatif pour le mettre en état de semi-conscience. Cela devrait mettre son cerveau au repos pendant quelques heures, vous pensez que ce sera suffisant pour que vous puissiez le traiter convenablement ? Ma main se posa sur la table, sur le dossier, pour m'aider à conserver un certain équilibre. Swann me devança d'une fraction de seconde : qu'il se fasse instantanément rembarrer par l'infirmier en chef ne fit qu'accentuer mon malaise. Toi Swann, tu n'es qu'un infirmier et tu es là pour assister le docteur Stepanovic. Fais disparaître ton double de là ou trouve lui une utilité si tu en es incapable. J'inspirai, me raclai la gorge. Attirai trois regards sur moi. Swann n'y est pour rien... je... pour être honnête, non seulement je partage son avis, même si j'ai toute confiance en vous pour tout ce qui est médical, mais... il y a aussi que...
Je tentai de choisir mes mots avec soin.Je ne sais pas exactement qui a eu l'idée de faire appel à moi, mais ne vous trompez pas sur le titre de docteur. Je ne suis pas médecin, juste docteur en psychologie et... mutant. Comme Swann : le sous-entendu plana dans la pièce. Et je crains de... d'avoir davantage empiré la situation qu'autre chose. Je ne pense pas être capable pour le moment d'aider Andrew comme il le faudrait. Pour le moment mais pas seulement : je n'avais de toute évidence en rien la force morale nécessaire pour supporter les illusions de cauchemar qu'il générait. Il vaudrait mieux le laisser dormir. Et on réessaiera quand tout le monde sera un peu plus... prêt, à faire face à ce genre de situation. A l'université, on nous apprend à identifier les démons des personnes et à les aider à y faire face. On ne nous apprend malheureusement pas à le faire tout en étant nous aussi harcelés par... Je secouai la tête : cette réflexion n'avait rien à faire là. Et j'avais peur d'ouvrir le poing et de voir la plume s'être densifiée à mon insu ces dernières minutes. Je vais arranger les choses, ne vous en faites pas. Juste... laissez nous quelques heures de repos. Je me forçai à sourire.
Quelques heures, le temps de mettre en place un plan d'attaque. Ou juste de voir si les ombres sur ma peau se dissipaient en même temps que les choses revenaient à la normale. Ou juste le temps de partir en courant, aussi. Et de ne plus risquer d'empirer la situation. Mon sourire faiblit.
Je paniquai. Vraiment. Et lorsque l'infirmier commença à parler, toute mon attention se jeta sur lui, sa voix n'étant rien de moins qu'une bouée jetée dans la tempête de mon affolement, battue par les vents violents de mon désarroi. Mais vous pouvez réparer les choses, n'est-ce pas ? Sa question, imprégnée de son calme, laissa dans ma gorge une boule de culpabilité qui me rendit aussitôt muet. Je secouai la tête, de gauche à droite, dans de petits gestes désespérés.
Revenir en arrière ? L'idée traça néanmoins son chemin dans mes pensées, bien malgré moi. Je déglutis. Je fuyais ma mutation, je ne la regardais jamais droit dans les yeux. Je ne sentais même pas toujours lorsqu'elle œuvrait autour de moi, le plus souvent. Grâce à votre don, la phrase résonna, comme en écho, dans mon esprit, alors que son double - Swann² ? - rétorquait, sur un ton que je ne parvins pas à définir. Amusé, sarcastique, moqueur, sombre ? Parce que tu crois franchement que ça suffira ? Si tu supprimes le facteur stressant ça va juste devenir un bon petit psychopathe en puissance. Il n'avait pas tort. Mais moi, j'étais incapable de parler, de prendre position, devant cette altercation, cette dispute entre deux reflets identiques et pourtant si différents, je le voyais bien désormais. Différents dans leurs regards, dans leur posture : le docteur en psychologie qui avait passé des années à rencontrer les personnes, à chercher à les écouter, les comprendre, les aider à se réparer justement, ne pouvait que discerner ces points de contraste que le temps, les secondes et leurs attitudes révélaient. Ferme ta gueule Sis ! Laisser mes études prendre le pas sur ma terreur eut l'effet bénéfique de me rendre davantage curieux qu'effrayé, j'en oubliais presque tout le reste. Y compris la venue prochaine de son supérieur, de celui à qui je devais ma présence aussi, de toute évidence. Je commençai à me détendre, l'attention étant portée sur autre chose que sur moi-même, mais tout vola brutalement en éclat : quand je m'y attendais le moins, Swann² se détourna de l'infirmier pour se placer devant moi : j'eus un nouveau mouvement de recul, le mur et un chariot métallique se liguèrent pour me couper toute retraite.
Il n'avait pas le calme et la bienveillance de Swann. Il n'avait pas cette douceur qu'avait l'infirmier. Il semblait être même aux antipodes de la douceur. Je m'affaissai sous sa colère. Qu'est-ce que tu nous as fait ? Tu sais très bien que y'a pas que le môme qui a été touché alors dis nous ce qui se passe ? Mes lèvres bégayèrent
Je fus forcer de regarder dans les yeux l'état dans lequel tout cela m'avait laissé. J'étais loin, bien loin, trop loin d'une quelconque sérénité salvatrice. Ma mutation réagissait comme un bouclier, comme un animal blessé, et... sur ma main une tâche noire se dessina, s'enroula, dans l'ombre d'une plume duveteuse. Les choses empiraient, réellement. Et les deux Swann continuaient de se disputer, sans que je n'ose les interrompre, sans que je ne parvienne même à envisager de me rappeler à leur bon souvenir. Sans... La porte claqua, une nouvelle personne s'immisça dans la pièce, une nouvelle cible de destruction.
Je déglutis. Encore. Me redressai, aussi. Pour faire illusion.
On tendit une main dans ma direction, j'hésitai à la saisir, me résignai à l'ignorer, le poing fermé.
Je tentai de choisir mes mots avec soin.
Quelques heures, le temps de mettre en place un plan d'attaque. Ou juste de voir si les ombres sur ma peau se dissipaient en même temps que les choses revenaient à la normale. Ou juste le temps de partir en courant, aussi. Et de ne plus risquer d'empirer la situation. Mon sourire faiblit.
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